Alexandra Cismondi, Parle-moi de ta famille, je te dirai qui tu es
Samedi 30 avril 2022 – Centre Culturel Tisot – La Seyne Sur Mer
« Eh bien dansez maintenant » c’est trente ans d’une saga familiale, onze personnages, trois générations dans un seul en scène haletant, où le corps et la famille sont au centre de l’attention. Après ses représentations à Châteauvallon – Le Liberté, scène nationale, Alexandra s’attaque à Avignon.
Quel a été l’élément déclencheur qui a fait naître ton projet ?
Cela fait déjà quelque temps que j’ai écrit « Eh bien dansez maintenant » . Je suis une amoureuse des films de Marcel Pagnol et depuis des années, j’avais envie de parler de LA famille. La mienne est rocambolesque, donc naturellement, j’y ai puisé mon inspiration. Ma famille est composée, d’un côté, de riches propriétaires terriens et de l’autre, d’immigrés italiens pauvres, qui travaillaient dans les vignes. Je n’osais pas me représenter sur scène, je me demandais pourquoi le public viendrait écouter mon histoire. Et puis j’ai croisé « La danse du diable » de Philippe Caubère. Je me suis alors lancée dans l’écriture, je me suis documentée, surtout auprès des membres de ma famille. Je posais sur la table un dictaphone durant les diners ! Par la suite, j’en ai parlé avec Emilie Vandenameele qui avait déjà abordé cette thématique dans son travail et qui a aimé mon « roman », qu’on a retranscrit en spectacle. Au fur et à mesure des lectures, on a remarqué que le texte abordait souvent la question du corps : le corps malmené, plié sous le poids des secrets, les problèmes tels que l’anorexie, la sexualité, … C’est pourquoi on a mêlé la danse au théâtre. C’est un seul en scène où j’interprète tous les membres de ma famille pour raconter mon histoire personnelle. Le personnage d’Alexandra est mon avatar, c’est ma propre analyse mais il parle à chacun d’entre nous. Je me suis documentée sur la psychanalyse et la psychogénéalogie. Souvent les questions sur les changements de notre corps sont dans notre passé, notre héritage. Il faut pardonner pour s’en libérer. Pour moi, la famille est une sorte de moule dans lequel on cuit durant l’enfance jusqu’à obtenir notre forme finale à nos vingt ans. On a parfois du mal à accepter ce moule, on déborde et il faut apprendre à s’en affranchir.
Les premières représentations ont eu lieu au Liberté, avec Avignon cela prend un nouveau tournant…
Charles Berling puis Pascale Boeglin Rodier ont lu le texte et m’ont invitée à faire une résidence. J’y ai fait deux représentations. Elles se sont bien passées, même si j’étais un peu fébrile. Aujourd’hui, la création a pris en force. Elle est prête pour Avignon ! Les répétitions ont commencé. Première le 5 juillet ! Voici venu le temps de donner le spectacle au public d’Avignon, j’ai peur et j’ai hâte, j’ai hâte et j’ai peur !
Comment s’est déroulée ta collaboration avec le Théâtre du Train Bleu ?
C’est une salle jeune et dynamique avec une programmation sélective dont je suis fière de faire partie ! Jean-Baptiste Sastre, un metteur en scène qui avait vu une des sorties de résidence à Châteauvallon, m’a convaincue d’appeler le théâtre pour présenter ma création durant le festival. Au début je devais jouer dans la petite salle puis on m’a annoncé que je serai programmée dans la grande ! #hâteetpeur
Pour toi, il n’y a pas de barrière entre danse et théâtre ? Tu te définirais comme une performeuse ?
On a tellement voulu me mettre dans une case… Je ne comprends pas pourquoi on devrait séparer la parole du mouvement. Je fais de la danse, du théâtre, je me suis également formée au clown, à la commedia, j’ai joué une biche dans un film qui danse du chorégraphe Sidney Leoni, (« Under Influence »), avec qui j’ai également collaboré sur « Eh bien dansez maintenant », ce que j’aime c’est ce fil justement qui va du verbe au geste, et inversement du mal au mot. Alors oui, on peut considérer cela comme de la performance, le terme me plaît car ce spectacle est une lutte. Une lutte pour trouver le corps juste.
Alexandra Cismondi, est une artiste protéiforme, diplômée de la Sorbonne en Culture, Politique et patrimoine, formée à la danse sous toutes ses expressions puis au théâtre et au clown aux Ateliers du Sudden. Elle y entame une collaboration avec François Bourcier en tant qu’autrice.
Elle y rencontre aussi ses futures collaborations, Raymond Acquaviva, Jérémie Lippmann, Françoise Ménidrey, Ingrid Graziani. Elle y écrit sa première pièce « D’amour ou pas » et poursuit avec « Nulle part à l’heure » Après avoir travaillé avec ou sous la direction de nombreux metteurs en scène et réalisateurs mais aussi chorégraphes; elle fonde la compagnie pluridisciplinaire Vertiges en 2017 à La Seyne-sur-mer. Elle joue dans la série Cannabis (Arte) sur Netflix et on l’a retrouvée en 2020 au cinéma dans « Tactiles » de Benoît Masocco.
Léa Muller