Alexandre Telliez-Moreni – De nouveaux modes de promotion et diffusion.

Toolong Records est le micro-label indépendant toulonnais. Il produit et distribue les projets de musiciens, principalement locaux mais pas uniquement, se spécialisant dans les diverses branches du rock indé. Alex nous détaille l’impact important de la situation sur son activité et ses artistes.

Comment Toolong Records a vécu cette situation ?

Les premières conséquences directes sont les annulations de concerts de mars à septembre. Nous ne sommes pas producteurs de spectacles mais nous étions coorganisateurs sur certains évènements, nous avons subi quelques pertes. L’impact financier le plus important est dû aux annulations de mes concerts, sous le nom d’« Hell Botcho » car l’argent gagné est réinvesti dans la trésorerie du label. Au cœur de l’activité du label, les ventes de disque ont fortement baissé, car tous les points de vente ont fermé, et notre distributeur était au chômage technique. Il était donc impossible de maintenir le calendrier des sorties. Tout le monde de la musique est presque à l’arrêt, et donc tous ceux qui y travaillent. Avant l’été, nous devions sortir les disques de The Crumble Factory et d’HifiKlub + Roddy Bottum, c’est reporté en septembre. J’avais également un projet documentaire sur le groupe Lune Apache « Varlifornia Dreamin’ », que l’on devait tourner en mai. On a reporté d’un an. Le groupe part à la recherche de la Californie dans le Var, c’est une autre façon de redécouvrir notre paysage territorial à travers les fantasmes de Lune Apache.

Quel sera l’impact sur le milieu de la musique selon toi ?

Je suis inquiet pour l’avenir. Beaucoup n’ont eu aucun revenu pendant un laps de temps énorme, notamment les artistes. Les miens ont souvent un travail à côté mais ce n’est pas le cas de tous bien sûr. Les distributeurs de disques se battent pour survivre même s’ils arrivent à mobiliser quelques aides. Je ne suis en général pas très doué pour les prévisions, mais là, j’ai tout de suite compris que la situation allait être grave : toute une économie a été mise en quarantaine. Personnellement, j’ai trouvé la décision trop extrême, on a réagi avec des outils moyenâgeux. Et quand je vois que tout le monde reprend ses habitudes aussi vite, je me demande à quoi ça a bien pu servir. Notre secteur était déjà en crise avant cela, le spectacle était la dernière source de revenu des artistes. Pour certains ce sont six mois de tournées qui ont été annulées, comment vont-ils rebondir ? D’autre part, je ne comprends pas la façon dont le Président s’est adressé au monde de la culture, avec mépris, simplement parce qu’on est dans un domaine récréatif. Et nous, en tant que petit label indépendant, nous sommes tout en bas de la chaîne.

Comment vois-tu l’après COVID-19 ?

Je m’interrogeais déjà sur les modèles de production et de distribution de disques avant le confinement. Les ventes de disque ne reviendront pas à la normale, donc je réfléchis à d’autres moyens de promotion et de diffusion. Nous engagerons moins de projets avec sortie d’album physique. Le format clip m’intéresse beaucoup et, à travers le label, j’apporte de cette façon une touche de direction artistique. Nous privilégierons peut-être les oneshot, dans des formats différents. Je suis incapable de le dire aujourd’hui ce dont le public aura envie. C’était déjà difficile de l’intéresser car l’offre musicale est très importante. Quant au Livestream, c’était une réponse d’urgence, mais, comme toujours, c’est marrant la première semaine puis on voit les limites. Les lives à la maison et les concerts à emporter existaient déjà et ils continueront, mais pour moi, ça restera anecdotique.

Site internet : Toolong Records