Baptiste Trotignon – Quarante doigts et beaucoup de surprises.

Hors-série Tisot 2023 – Pianoforte – Le 16 février au Centre Culturel Tisot – La Seyne-Sur-Mer 

Un spectacle décapant avec Baptiste Trotignon, Eric Legnini, Bojan Z & Pierre de Bethmann. Quatre grands pianistes se partagent deux pianos et deux Fender Rhodes pour une rencontre inédite et on ne peut plus alléchante.

Baptiste Trotignon, Eric Legnini, Bojan Z, Pierre De Bethmann, parlez-nous de chacun d’entre vous, et de ce qui vous rapproche.
Nous avons un ADN générationnel commun. Nous sommes très différents stylistiquement, mais avons grandi sur la scène jazz parisienne à la même période. Pierre aime une musique pure et complexe, Eric est plus blues et swing, Bojan vient de Yougoslavie et a donc des influences de musiques de l’Est, et moi j’ai une culture de piano classique. Mais nous avons des amours en commun. Au départ, il y a trois ans, ce projet est une idée du producteur Renaud Di Matteo pour le Tourcoing Jazz Festival. Nous nous connaissions depuis longtemps, j’avais déjà fait des concerts avec Bojan, mais jamais à quatre. Ce devait être un one shot, mais la sauce a pris tout de suite. Et il y a eu une captation réalisée par Mezzo, donc nous avions des images à partager. Même sans disque à l’appui, le projet a fonctionné, et nous recommençons donc à le jouer.

Parlez-nous du Fender Rhodes.
C’est un instrument popularisé par le jazz rock des années 70, par Ray Charles notamment. Sur scène, nous avons deux pianos et deux Rhodes, ce qui donne des alliages sonores originaux. C’est une première, je ne crois pas que ça existe dans l’histoire du jazz. Le Rhodes a une couleur différente du piano, c’est un des rares pianos amplifiés mais ce n’est pas un synthétiseur qui imite d’autres instruments, il a son propre son et permet de nombreuses combinaisons.

Quel est le répertoire que vous jouez dans ce concert ?
C’est un répertoire de partage, chaque musicien amène une composition, le reste étant des reprises de morceaux d’horizons différents, de jazz, de blues, et même une surprise pop à la fin du concert. C’est très varié, mais aussi très rigoureux, bien que chacun soit très libre dans l’espace qu’il a pour improviser. Ma composition se nomme « Moods », et est dans l’esprit 70s, un peu à la Herbie Hancock. C’est un morceau calme alors que celui d’Eric « Boda Boda » est plutôt vif, ce qui compte c’est la couleur globale du spectacle.

Quelle est la particularité de jouer à quatre pianistes ensemble ?
C’est très fragile et un travail d’orfèvre comme les horloges suisses. Quatre personnes, ça fait beaucoup de touches, quarante doigts ! (Rires) ça peut vite saturer, il faut être attentif à ne pas en faire trop, alterner entre moments où on laisse de l’espace à chacun, mais aussi avoir du gros son quand il y a besoin. C’est possible car on se connait bien. En tout cas, c’est très fun et communicatif dans l’énergie. Il y a du partage, beaucoup de plaisir, et si on aime les claviers c’est assez orgiaque. C’est un son assez différent de ce dont on a l’habitude, et le répertoire plaît. Ce qui compte c’est l’interplay et la façon dont on communique notre jeu au public.

Des conseils pour de jeunes pianistes qui débutent dans le métier ?
Ne douter de rien. Ça m’arrive de faire des masterclasses où l’on rencontre des jeunes qui ont dix-huit ou vingt ans, et qui veulent savoir s’ils vont s’en sortir. Quand on avait cet âge, on ne s’est pas posé la question, on n’avait pas le choix. J’avais besoin de faire ça. On se pose trop de questions, ce n’est pas facile aujourd’hui, mais il y a vingt-cinq ans non plus, même s’il n’y avait pas internet pour créer la peur. Si on a quelque chose à dire et qu’on est bon dans ce qu’on fait, il faut foncer. C’est un mélange de talent et de volonté, et d’un peu de chance aussi.

 

Fabrice Lo Piccolo

 

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