Caroline Ribot & Victor Lassus – Désenchantée ?

« Péril ordinaire » le 11 avril à l’Espace des Arts

Caroline, comédienne, et Victor, metteur en scène, nous invitent à une plongée intense dans « Péril ordinaire », la nouvelle création du Collectif l’étreinte, un seul-en-scène poignant qui explore les désillusions de la vie adulte. Entre récit intime et théâtralité brute, ce spectacle donne à voir et à ressentir une réalité crue mais non dénuée d’espoir.

Pourquoi avoir choisi le format du seul-en-scène pour ce spectacle ?

Victor : Nous avons construit « Péril ordinaire » autour du personnage de Camille, qui porte en elle nos histoires respectives. Ce choix du seul-en-scène s’est imposé naturellement, car Camille est à la fois le cœur du récit et sa narratrice. Elle donne à voir son expérience à travers dix-sept personnages qu’elle incarne seule. Cela permet d’offrir un prisme unique sur son parcours, une vision subjective et intime de sa réalité.
Caroline : Incarner tous ces personnages a été un défi passionnant. Nous avions commencé par les définir lors de notre première résidence à Châteauvallon. Puis, j’ai puisé dans mon expérience du doublage pour leur donner corps et voix. Victor m’a apporté sa technique pour passer d’un personnage à l’autre avec fluidité.

Le spectacle aborde des thèmes désenchantés comme le deuil, l’addiction, les rapports toxiques. Comment avez-vous trouvé l’angle juste ?

Victor : Le mot est juste, d’ailleurs nous utilisons le titre « Désenchantée » de Mylène Farmer dans la bande-son. On voulait être dans une théâtralité du réel, sans fard, en explorant ces problématiques dans toute leur complexité. Je souhaite créer un théâtre actuel, qui parle au public. Le deuil est le point de départ, mais il révèle tout un éventail de blessures : les illusions perdues, les pièges insidieux de certaines addictions. Notre but n’est pas de moraliser, mais d’ouvrir un espace de réflexion et de discussion.
Caroline : C’est un théâtre du désenchantement, mais aussi de l’espoir. On veut dire aux spectateurs : « Venez, on va tous s’en sortir ». Malgré la noirceur des thèmes, il y a toujours une énergie festive, une volonté de survivre, et la pièce est aussi très drôle.

Comment avez-vous pensé la mise en scène pour porter cette parole ?

Victor : On a opté pour une scénographie épurée. Une chaise, un costume, un accessoire marquant. L’essentiel repose sur le jeu. Comme en littérature, on laisse une place à l’imagination du spectateur.
Caroline : Et la musique joue un rôle central. Luca Schaumburg, un ami compositeur, crée un véritable décor sonore. Le rêve de Camille, c’est la musique. Elle l’abandonne, puis peut-être la retrouve… On ne sait pas si c’est fantasmé ou réel, mais on veut que le public ressente physiquement cette énergie, cette possibilité de renaître. C’est pour ça que la pièce finit par un concert : je chante, Victor me rejoint sur scène pour rapper et Luca Schaumburg est aux machines.

Un mot sur vos lieux partenaires de création…

Nous sommes au moment où nous te parlons en résidence à l’Espace des Arts au Pradet, nous travaillons sur ce qui se passe au plateau et Luca Schaumburg en parallèle crée les ambiances musicales. Nous avons également des partenariats avec Châteauvallon, le Théâtre de l’Odéon et la MJC Jean Macé à Lyon. Nous faisons un théâtre politique et social et il est pour nous important de continuer à travailler avec nos partenaires historiques qui se battent pour la création.

Fabrice Lo Piccolo