Christian Hecq – Comédiens et marionnettes pour un classique de la littérature.

>> 20.000 lieues sous les mers, les 15 et 16 mars au Liberté à Toulon

Embarquez à bord du Nautilus grâce à Christian Hecq, sociétaire de la Comédie Française, et Valérie Lesort, metteuse en scène et plasticienne, qui ont décidé d’adapter cet immense classique de Jules Verne en utilisant la technique du théâtre noir, avec comédiens et marionnettes au plateau.

Qu’est-ce qui vous a poussé à choisir ce monument de la littérature, et en quoi reste-t-il actuel ?
Nous avons réalisé l’adaptation et la mise en scène à deux, avec Valérie Lesort. Au départ, ce qui nous intéressait, c’était le travail avec les marionnettes. Nous étions déjà fascinés par les marionnettes hybrides et le théâtre noir, ayant réalisé des pastilles pour Canal+. Le spectacle a maintenant neuf ans. Étant à la Comédie-Française, nous souhaitions mêler acteurs et marionnettes, et Valérie Lesort a eu l’idée d’adapter « 20.000 lieues sous les mers ». L’œuvre mêle les mondes aquatique et terrestre. D’une part, les comédiens jouent dans le sous-marin, et d’autre part, derrière le hublot, ils réalisent un travail marionnettique pour faire exister le monde marin. Concernant son actualité, le Capitaine Nemo avait déjà des idées écologiques très poussées et défendait les minorités, des thématiques très actuelles.

Parlez-nous de votre complicité avec Valérie Lesort, de l’apport des marionnettes, et pourquoi avoir choisi de les faire manipuler par les comédiens ?
Le projet est né à la Comédie-Française, et Eric Ruf souhaitait que ce soient des comédiens qui manipulent. Nous avions pensé engager des manipulateurs, mais ce qui l’intéressait, c’était que nous apprenions aux acteurs l’art de la manipulation que nous avions étudié avec Philippe Genty, le marionnetiste. Quand les comédiens ne jouent pas, ils mettent leur tenue invisible, et deviennent manipulateurs. Les marionnettes fonctionnent très bien pour donner l’illusion de l’eau, pour rendre cette qualité de mouvement que les poissons ont dans l’eau. Cela rend l’expérience immersive pour le public. Valérie Lesort, avant d’être metteuse en scène, était plasticienne. Elle a eu l’idée d’exploiter nos savoir-faire, elle dans la fabrication et moi dans la manipulation. Nous sommes assez complices, nous partageons des idées communes sur les spectacles, des goûts communs et la technique est une part intégrante de nos spectacles.

Pouvez-vous nous parler des personnages, en particulier de ce célèbre mais mystérieux Capitaine Nemo ?
Le Capitaine Nemo, que j’avais incarné à la Comédie Française et qui est joué en tournée par Eric Verdin, est un personnage assez sombre, écologiste dans l’âme. Dans « 20.000 lieues sous les mers », il défend déjà la cause des baleines et s’oppose à Nedland, le harponneur qui considère la chasse aux baleines comme un sport. Son discours est protecteur de la nature et des minorités. Nous avons choisi de développer son histoire, en révélant, grâce à un extrait de « L’ile mystérieuse » , qu’il est en fait un Indien dont la famille a été décimée par les Anglais, ce qui explique sa haine envers eux. Dans le sous-marin habitent le Capitaine Nemo et son second. Nous avons dû rendre les personnages plus théâtraux, inventant des situations de jeu qui ne sont pas décrites dans le roman. Ce second ne connait pas l’extérieur, il est un peu à la limite de la normalité, un peu comme Gollum. On retrouve aussi les prisonniers, sauvés par Nemo mais condamnés à rester dans le sous-marin, avec le professeur en Sciences Naturelles Aronnax, intéressé par la faune aquatique et qui supporte bien l’emprisonnement, son serviteur, que l’on a coloré en le rendant très peureux, et Nedland, grand maître harponneur, et le plus révolté.
Vous avez remporté plusieurs Molière, dont celui de la création visuelle pour ce spectacle. Parlez-nous de l’importance de cette distinction.
Le Molière du visuel récompense plusieurs métiers, scénographe, plasticien, éclairage, son, c’est un Molière de la valeur esthétique du spectacle. Recevoir un Molière est bien sûr gratifiant et contribue à la promotion du spectacle.
Fabrice Lo Piccolo

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