Christian Philibert – Un festival provençal : films, concerts et folklore réinventé.

« Espigoule déboule » au Beausset les 18 et 19 juillet

Il y a vingt-cinq ans, « Les 4 saisons d’Espigoule » devenait un film culte, portrait tendre et décalé d’un village imaginaire enraciné dans la Provence réelle. Aujourd’hui, son réalisateur, Christian Philibert relance une série de festivals qui prolongent cet esprit, entre patrimoine et création contemporaine. Après son départ à Ginasservis, prochain arrêt : Le Beausset, les 18 et 19 juillet.

Qu’est-ce qui t’a donné envie de relancer une série de festivals consacrés aux “4 saisons d’Espigoule” ?
Le festival a une histoire. On l’a lancé en 2009 pour fêter les dix ans du film, il a duré quatre éditions, puis on a arrêté. Et l’an dernier, une rencontre a tout relancé : François-Xavier Martin, directeur de la société Concept Evénements à Brignoles, et de la société Oregon, a découvert les festivals grâce au documentaire « Il était une fois Espigoule ». Il a eu un vrai coup de cœur. De là est née une envie commune de relancer cette aventure, avec des moyens techniques et une équipe solide. Cette fois, ce sera un festival itinérant, qui ne restera pas cantonné à Ginasservis. Il démarre là-bas mais s’installe ensuite au Beausset les 18 et 19 juillet, et l’an prochain il circulera dans toute la région. L’idée, c’est de faire rayonner l’identité provençale dans toutes ses dimensions : artistique, culinaire, musicale, sportive. Avec aussi une touche très actuelle : du “folklore réinventé”, comme le font Les Cigales Engatsées ou Ciao Basta, qui revisitent la tradition à leur manière.

Comment expliques-tu le succès culte des « 4 saisons d’Espigoule », et comment le film s’intègre-t-il au festival ?
C’était mon premier long-métrage, tourné dans mon village natal de Ginasservis, rebaptisé Espigoule pour l’écran. Sorti en 1999, mi-documentaire mi-fiction, ce film repose sur une vraie alchimie : les habitants y jouent leur propre rôle, et toute une année de vie de village y est concentrée en 1h40. On est plus proche d’Astérix que du documentaire : des situations absurdes, des moments de pure folie… mais toujours nourris d’authenticité. C’est ce mélange qui a touché les gens. Le magazine Première l’a désigné meilleur film du mois deux fois de suite, les médias ont relayé l’enthousiasme, et le film est devenu culte. Espigoule, c’est désormais l’archétype du village provençal, à la croisée de quatre départements, avec son animal mythique, le fameux phacomochère, qui est même entré au Museum départemental du Var !
Pendant le festival, on projettera « Les 4 saisons d’Espigoule » en plein air sur la place du Beausset le samedi soir. En parallèle, la médiathèque accueillera mes documentaires : un univers complet s’est construit autour du film. Le 19 juillet, à 10h, on diffusera « Il était une fois Espigoule », suivi d’une conférence à 11h sur la naissance du festival. Et l’après-midi, place à mes documentaires historiques sur des personnages méconnus de la région.

Quel est le programme musical ?
On propose un mélange d’artistes confirmés et de jeunes talents. A Ginasservis, on a eu DJ Bobzilla, une figure de la scène marseillaise, puis Les Cigales Engatsées et Ciao Basta. Le samedi 18 au Beausset, Moussu T e lei Jovents seront là, groupe mythique de La Ciotat issu du Massilia Sound System. Il y aura aussi DJ Kayalik (DJ de Massilia), accompagné du jeune MC Souye. Et bien sûr, le phacomochère a sa chanson ! Le groupe Ben Aqui de Draguignan a composé un morceau spécialement et a joué le samedi à Ginasservis. Le Bastringue Divague, qu’on verra en déambulation au Beausset, a aussi écrit « La Valse d’Espigoule » avec son groupe Manu & Co. Il y aura deux scènes le samedi après-midi : une scène “trad” avec ateliers de balèti pour apprendre à danser, et une scène parallèle plus rock, rap et électro. Le soir, on propose « La nuit du Phacomochère », une soirée techno animée par Sonophages, un collectif de Ginasservis. On fait aussi appel à l’école de musique du Beausset, qui jouera un répertoire autour de Vincent Scotto. C’est important pour nous d’associer les talents locaux. Et surtout : tout est gratuit.

Quelle vision pour l’avenir du festival ?
L’année prochaine, on vise trois étapes ou plus. On voudrait aller dans des villes comme Saint-Raphaël, Toulon ou Draguignan. L’idée est de faire vivre le festival au-delà d’un simple rendez-vous : en faire un vrai lieu de rencontres, un espace permanent dédié à la culture provençale, et un tremplin pour les jeunes artistes. Créer depuis la région, c’est difficile – c’est un combat que je partage avec Massilia Sound System. On veut montrer qu’on peut faire des choses fortes, enracinées ici, et les transmettre aux nouvelles générations : leur donner envie d’être fiers d’être provençaux, ou sudistes, tout simplement.

Tu seras aussi en tournée avec « Maquisards », spectacle et film documentaire en partenariat avec la Cie Artscénicum. Peux-tu nous en parler ?
En 2024, on a lancé un ciné-spectacle porté par la compagnie Artscénicum, avec Philippe Chuyen à la mise en scène. On a eu douze représentations, et ça continue cet été. On propose un film et un spectacle théâtral autour du maquis Vallier, dans le Var, où de jeunes résistants ont vécu six mois dans des conditions très dures pour libérer la Provence. Nous avons filmé six jeunes non-professionnels issus des missions locales, de dix-huit à vingt ans, l’âge de ces maquisards. Cet été, je sors le documentaire de cinquante-cinq minutes minutes sur le maquis Vallier. puis le long-métrage qui ira bien au-delà sortira en salles en 2026.

Fabrice Lo Piccolo