Dossier spécial : Festival Regards sur rue – Bahoz Temaux – Vivre la différence.

« Newroz », le 27 et 28 septembre au Square Malsert

Fidèle du festival, l’artiste de cirque et musicien Bahoz Temaux y revient cette année en solo avec « Newroz », une création intime et poétique mêlant acrobatie et musique.

Pouvez-vous vous présenter et revenir sur votre parcours artistique ?
Je suis artiste de cirque et musicien, avec une forte sensibilité pour les musiques orientales. J’ai d’abord travaillé dans un grand collectif spécialisé dans la balançoire russe et la bascule. Ce fut une expérience riche, centrée sur la force du groupe et l’énergie du cirque comme langage universel. Puis, progressivement, j’ai eu envie d’explorer un chemin plus personnel. Je me suis tourné vers l’acrobatie au sol et la musique, jusqu’à créer aujourd’hui un travail en solo où je fais dialoguer récit, musique et corps.

Vous avez choisi un nom kurde pour votre spectacle, que signifie-t-il ?
Newroz veut dire « jour nouveau » en kurde. C’est aussi le nom du nouvel an kurde et perse, une fête liée au printemps et au renouveau. J’ai choisi ce mot car il porte un message d’espoir universel : celui d’un jour nouveau, d’un monde plus tolérant où le racisme n’aurait pas sa place. C’est également une manière de renouer avec mes origines et de donner une dimension symbolique au spectacle. Ce « jour nouveau » évoque à la fois renaissance et lumière qui se lève après l’ombre.

Quelle est l’origine de ce spectacle ?
Il est né d’expériences personnelles, face au racisme ordinaire. Sur le moment, je manquais souvent de mots. J’ai donc choisi d’y répondre autrement : en transformant ces vécus en matière artistique. Sur scène, je raconte mon histoire avec humour, poésie et douceur, sans colère. Je passe de la parole à la musique, puis à l’acrobatie. Je joue de la basse, du saz et je chante. J’ai créé une structure télescopique inspirée d’un pied de micro géant : elle me permet de grimper jusqu’à cinq mètres, symbole de la difficulté à se faire entendre. Chaque discipline enrichit le récit : la musique colore mes paroles, l’acrobatie les prolonge. Ensemble, elles composent un conte scénique.

Comment « Newroz » est-il reçu par le public ?
C’est un spectacle tout public, conseillé à partir de neuf ans. Même si je parle de racisme, il touche plus largement à la question des différences, et chacun peut s’y reconnaître. Les retours sont souvent très émouvants : certains spectateurs viennent bouleversés, parfois en larmes, car ils se reconnaissent dans mes récits ou se sentent concernés par le message. En extérieur, le rapport au public est direct : je suis au milieu des spectateurs, et un simple échange de regards ou de sourires crée une proximité forte. En intérieur, c’est différent : la lumière et l’obscurité de la salle ouvrent d’autres imaginaires. Quand il pleut, j’ai une version adaptée, sans acrobaties, mais qui garde l’essence du spectacle grâce à la musique et au récit.

Qu’aimeriez-vous que le public retienne de « Newroz », et quels sont vos prochains projets ?
J’aimerais que chacun reparte avec l’idée que certaines pensées issues de l’ignorance sont absurdes, et que tolérance et entraide sont essentielles. Si je devais résumer « Newroz » en trois mots : tolérance, musique et douceur. Pour la suite, je prépare un projet qui me tient particulièrement à cœur : un duo avec mon frère jumeau, en situation de handicap mental. Là encore, il s’agira de parler de différence, mais cette fois à travers le handicap. Sa création est prévue pour 2028. Julie Louis Delage