Elisabeth Serre – Passeuse de talent.
Sa galerie, nichée à l’entrée du Parcours des Arts à Hyères, est multiple. Bougies Lily Blanche, bijoux africains, peintures, sculptures, Elisabeth expose ses créations et accompagne des créateurs qu’elle aime dénicher et aider à évoluer. Cet été, Sophie L., une des artistes permanentes de la galerie a créé des œuvres sur la Villa Noailles.
Quels artistes présentes-tu à la galerie ?
J’ai des artistes exposés en permanence. J’aime l’idée d’être un incubateur de talents. Yann Masseyeff, par exemple, a réalisé son premier mur pour la galerie, il avait ce projet depuis longtemps et m’a demandé : « Est-ce que tu me permettrais de faire cent-quatre-vingts trous dans ton mur ? » Aujourd’hui il travaille avec Philippe Stark, a exposé à la Secret Galery… Je tends la main aux artistes, puis ils volent vers de nouvelles aventures. C’est ce que j’adore. Yann est sculpteur, il travaille le grès, en intégrant souvent ses œuvres à des projets d’architecture d’intérieur, car ce sont des sculptures murales. De même, je suis allée chercher Sophie L. dans son atelier à la Ciotat et aujourd’hui c’est une peintre cotée et sollicitée par de nombreuses galeries. étant architecte de formation, elle travaille sur les lignes d’architecture. Elle a un univers très marqué avec une palette de couleurs précise, celle des carreaux de ciment des années 30 que l’on trouve dans nos anciennes bastides et que l’on connait tous. Elle va à l’essentiel, avec quelque chose d’assez scandinave dans sa façon dépouillée de traiter les sujets. Elle peint beaucoup la Méditerranée, les calanques… C’est une peinture que le spectateur s’approprie facilement. Virginie Tarrazi est sculptrice animalière. Là, on est dans les rondeurs des formes, avec des sculptures très organiques. Elle travaille bronze et terre cuite et peut réaliser de très grosses pièces, comme la sculpture de lion que j’expose, ou de plus petites. Verane est céramiste et a fondé la Maison Deia. Elle crée des céramiques d’art d’inspiration méditerranéenne, Deia étant un petit village de pêcheurs à Majorque. Elle montre une terre brûlée par le soleil. C’est très dépouillé, elle a enlevé tout le superflu pour aller au cœur de la matière. Elle crée des assiettes, des bougeoirs, des Moon Faces… Jean Percet m’a confié tout son travail : il a fait une belle carrière de costumier et de décorateur, on retrouve d’ailleurs ses œuvres à la BNF. C’est un grand coloriste qui a travaillé avec Planchon, Godard… Il a réalisé une première expo autour des mots, mais représentés indépendamment de leur sens. Au final, ce sont de belles aventures humaines, des rencontres, des histoires d’amitié. Il n’y a que ça qui m’intéresse vraiment, les hommes et femmes derrière les œuvres et ce qu’ils veulent transmettre, une émotion, une histoire… Nous avons aussi créé, avec Raymond Pastorelli, un collectif inclusif, avec des artistes en situation de handicap et d’autres non handicapés. Nous exposons pour les Journées Européennes d’Archéologie, le 17 juin, sur le site d’Olbia. C’est issu du travail que j’effectue depuis dix ans avec les Ateliers de Lily Blanche, qui vont aujourd’hui avoir une présence permanente dans le parcours des arts d’ailleurs.
Tu proposes aussi de l’art africain…
Je peins et créé des bijoux et suis inspirée par l’Afrique depuis longtemps. Etant danseuse à l’origine, j’ai travaillé toute ma vie sur le corps pour aller saisir à travers un mouvement, une posture, la grâce qui peut se dégager de celui-ci. Je continue d’ailleurs car j’enseigne le Qi Gong, mais dansé, à la Villa Magdala. Je suis donc galeriste mais avec une sensibilité d’artiste. Tu ne fais pas le travail de la même façon quand tu perçois celui des autres en tant qu’artiste, il a une résonnance particulière. En art africain, j’essaie de dénicher des pièces rares. J’ai beaucoup voyagé en Afrique, et je suis toujours en relation avec des amateurs d‘art africains. En ce moment, j’ai une robe de chef africain, ancienne, très rare, enduite de décoctions de plantes que l’on trouve uniquement dans des forêts sacrées de Guinée. J’aime aller chercher ce type d’objets, des talismans, des totems, j’ai un peu l’impression qu’ils me protègent. Ils m’ont toujours suivie et cela me tient à cœur qu’ils soient présents à la galerie.
Cet été, tu exposes Sophie L. qui a créé des toiles représentant la Villa Noailles…
J’ai répondu à l’invitation de Jean-Pierre Blanc et Magalie Guérin, à l’occasion du centenaire de la Villa Noailles, qui m’ont demandé si je voulais être partenaire de l’événement. Sophie L. s’est emparée du sujet et c’est un beau succès. Elle va travailler là-dessus jusqu’à la fin de la saison. Elle avait carte blanche et a choisi de représenter des vues, intérieures et extérieures, de la Villa Noailles : la verrière, la terrasse… Elle va toujours rechercher des angles qui ne sont pas forcément les plus vus et l’on reconnait immédiatement son style.
Fabrice Lo Piccolo