Franck Mei – Une féerie moderne.
« Raoul Dufy et la mode » jusqu’au 16 novembre au Musée de la Banque à Hyères.
Couleurs, lumière, bonheur, mouvement, caractérisent les œuvres de Raoul Dufy, artiste touche-à-tout et amoureux de la Provence. Il est à l’honneur pour son travail dans le monde des soieries et textiles divers au Musée de la Banque à Hyères, où il séjourna plusieurs fois. Visite et échange avec Franck Mei, directeur du musée et commissaire d’exposition.
Raoul Dufy a exploré de nombreux domaines artistiques, pourquoi avoir choisi de montrer son incursion dans le monde de la mode ?
Raoul Dufy, bien que surtout connu pour sa peinture, est aussi le premier artiste à avoir travaillé avec l’industrie textile, surtout les manufactures de soieries de Lyon. Il est également un des premiers – comme Andy Warhol plus tard – à avoir tissé des liens entre art, communication et commerce. Pour la Maison de soierie Bianchini-Férier (Lyon) il a réalisé plus de mille motifs pour tissus, soie, coton, ou laine, l’idée était donc de mettre en avant cette partie de son œuvre extrêmement créative, mais plus en relation avec le design qu’avec l’art à proprement parler.
Pouvez-vous nous décrire l’exposition ?
L’exposition montre deux moments de la vie de Raoul Dufy. Le premier étant la rencontre de Paul Poiret – grand couturier des années 1920 et 30 – avec la peinture de Dufy, qui l’intéresse énormément. Ils deviennent amis et Paul Poiret propose au peintre de réaliser des motifs pour ses tissus, ses créations de robes et de vêtements. Ils s’installent à Paris dans ce qu’ils nomment “La Petite Usine“, un minuscule atelier où, à trois, Paul Poiret, Raoul Dufy et un chimiste (pour les colorants), ils créent quelques motifs et vêtements qui seront remarqués par l’industriel Charles Bianchini. Un contrat est alors signé entre la Maison Bianchini-Férier et Raoul Dufy, et c’est là que débute la deuxième période de la vie de l’artiste mise en avant dans l’exposition. Ce contrat offre au peintre la possibilité de réaliser pour la maison de soierie une production tellement importante, que cela lui procure une indépendance financière pendant plusieurs années, lui permettant de peindre comme il l’entend. On trouve donc dans l’exposition une représentation de “La Petite Usine“, avec des robes “historiques“ de Paul Poiret, ou encore un immense châle de fils d’or et de soie, et une évocation de la maison de textile Bianchini-Férier avec des tampons d’imprimeurs sur tissus, des étagères chargées de robracks (dispositif de présentation d’échantillons d’étoffe), des photos anciennes, etc. Enfin, au centre de l’exposition se trouve une sorte de podium en croix où sont présentés des vêtements, souvent des robes créées par Paul Poiret, et reconstituées par un couturier historique en relation avec la Maison Brochier-soieries de Lyon. Il faut préciser que les trois-quarts des prêts viennent de la Maison Brochier-soieries. Il y a également des costumes de films et d’opéra, ainsi que des robes de couturiers : Christian Lacroix, Karl Lagerfeld, Agnes B. ou Olivier Lapidus. Sur les murs, les motifs très colorés de Dufy pour étoffes sont encadrées comme des oeuvres d’art, et on peut également suivre une projection d’un défilé de Karl Lagerfeld, avec la fameuse “robe écailles ».
Il ne faut pas oublier de visiter le sous-sol ?
Il est impératif de descendre au sous-sol afin d’admirer les motifs abstraits de Raoul Dufy ! Il faut également rappeler qu’il est important de découvrir le bâtiment lui-même, les locaux d’une ancienne banque, qui sont très intéressants.
Quelle exposition prendra la suite de celle-ci ?
Ce sera une exposition sur Gustave Courbet avec certainement en sous-titre : “Du chant de la nature aux voix de la révolte“…
Weena Truscelli.