François Morel – Ensemble dans le même bateau.
>>Le 9 juillet à Châteauvallon à Ollioules.
Dans le cadre du Festival d’été de Châteauvallon, l’ex-Deschiens François Morel se fait chanteur et comique dans « Tous les marins sont des chanteurs », un spectacle musical drôle et espiègle donnant corps et voix au marin-poète breton Yves-Marie Le Guilvinec (1870-1900).
D’où vous est venue cette idée de redonner vie aux poèmes d’Yves-Marie Le Guilvinec ?
Quelle version je vous donne ? La vraie ou la fausse ? La mythique ou la réelle ? J’étais dans un vide-grenier à Saint-Lunaire, en Ille-et-Vilaine, et je suis tombé sur un fascicule qui m’a rappelé une chanson que chantait un de mes grands-oncles lorsque j’étais enfant. J’ai regardé cette brochure, elle s’appelait « La Cancalaise », elle était datée de 1894, et les chansons m’ont plu. J’ai trouvé qu’elles parlaient assez bien de la réalité d’aujourd’hui et j’ai eu envie de développer ça avec mes copains Gérard Mordillat et Antoine Sahler.
Quelle est l’autre version ?
C’est Gérard Mordillat, qui organise un festival de cinéma au Havre sur les films de mer avec Odile Conseil, qui m’a demandé si je ne pourrais pas chanter des chansons marines pour conclure son festival. Comme je n’en ai pas à mon répertoire, je me suis dit que, le mieux, c’était d’en inventer. On a donc inventé ces chansons marines à cette occasion et Gérard Mordillat a donné vie au personnage d’Yves-Marie Le Guilvinec [« Tous les marins sont des chanteurs », Calmann-Lévy, 2020]. Puis on a développé la question en faisant un spectacle avec les deux complices déjà cités. Antoine Sahler a écrit toutes les musiques du spectacle, avec Amos Mah, au violoncelle, à la guitare et au chœur, Muriel Gastebois, aux percussions et au chœur, et Romain Lemire dans le rôle du conférencier. On est partis de l’idée d’un poète qui serait breton et en compétition avec Théodore Botrel, qui était, à l’époque, le grand chantre breton, mais qui avait une connaissance un peu lointaine de la Bretagne et de la mer. On s’est dit : « Tiens, on va inventer un personnage à la fois très marin et auteur de chansons.
Ce spectacle est à fort ancrage breton. En quoi est-il aussi universel ?
Les chants de marins, c’est fait pour se donner du courage, pour se dire qu’on est tous dans la même galère, qu’il faut qu’on aille tous dans le même sens et qu’on chante ensemble pour se donner du cœur à l’ouvrage. C’est un spectacle qu’on ne joue pas uniquement en Bretagne. Il trouve des échos partout. Le fait d’inventer un personnage, de le déplacer dans l’espace et dans le temps, permet aussi de parler, en faisant un pas de côté, de l’actualité et du monde d’aujourd’hui. Par exemple, il y a des chansons qui parlent de la surpêche. La mer, c’est quand même son inspiration principale, Le Guilvinec parle de la façon dont il faut se comporter en mer pour que la planète vive, pour que les hommes ne se noient pas dans cette mer. Ces chansons parlent d’une façon très contemporaine de la société. Dans un spectacle, j’aime aussi le mélange des genres. Ici, on passe rapidement d’une émotion à l’autre, d’un ton à un autre. C’est un spectacle très joyeux mais qui est ancré dans une réalité sociale et politique. Et fondamentalement, c’est un spectacle qui est là pour qu’on soit ensemble. C’est un spectacle de chansons et d’humour.
Alors, ce Le Guilvinec, a-t-il réellement existé ?
Quand on va voir une pièce de théâtre, on donne réalité à des personnages qui n’existent pas vraiment, qui sont des figures un peu inventées. C’est même le principe du théâtre. Le Guilvinec, quand on le joue sur scène, n’existe pas plus que Macbeth mais pas moins.
Dominique Ivaldi