François Veillon – Etre libre.

Le Telegraphe, avec sa superbe architecture extérieure et intérieure, niché au coeur de Toulon, fait partie de ces lieux de vie qui se réinventent en permanence. Le confinement a permis à son créateur de penser sa vocation première et ses envies authentiques. Dès la rentrée, il nous réserve de belles nouveautés.

Comment as-tu vécu les annonces de confinement ?

L’annonce de la fermeture, comme un soulagement. Tenir un lieu culturel demande énormément d’énergie et d’écoute. Avant le confinement, je ressentais un sentiment de fatigue générale. Il a permis de créer une vraie pause, qui a induit une réflexion sur comment fonctionner et s’investir dans le domaine culturel. Pourquoi un lieu s’investit-il au sein d’une cité comme Toulon ? Il y a beaucoup d’acteurs culturels, dans tous domaines : musique, théâtre, arts graphiques, festivals, écriture, poésie, les grands représentants de la culture, que l’on connait, et de nombreux acteurs associatifs, qui font de très belles propositions. Le Telegraphe est un lieu de vie, c’est son ambition. Au départ, il avait comme intention de faire en sorte que les gens puissent se rencontrer, au-delà de leurs centres d’intérêt propres. C’est un lieu culturel par le fait qu’il contribue à définir une façon de vivre dans la cité, pas au sens de musée, de centre d’art, ou de lieu clairement défini comme le Liberté. Le Telegraphe est hybride. La Culture est devenue un bien de consommation, et appelle un besoin oppressant de communiquer en permanence. J’aimerais que nous prennions le temps de faire des propositions sur la base d’envies sincères. Nous serons fermés tout l’été, et dès la rentrée, nous aurons des événements mixant différents arts, mais pas uniquement : on pourrait, dans une conférence qui traiterait d’expériences paranormales, retrouver des acteurs du mieux-vivre, des professeurs de Reiki, des arts graphiques, des musiciens… Tout cela dans une démarche responsable. Nous allons ouvrir un restaurant au rez-de-chaussée, le Beam, avec à sa tête le chef Arnaud Tabarek. Nous souhaitons changer la façon de se nourrir, en faisant notamment appel à des producteurs locaux, mais aussi avoir des propositions autour : ouvrages sur le domaine de la santé, écriture, poésie… Le restaurant sera ouvert le midi, l’après-midi et une partie du soir, mais plus la nuit. Nous sommes à un croisement important. La Culture, depuis ces quarante dernières années, n’aura jamais été autant mise en demeure de s’investir sur son temps, d’intégrer le passé, pour projeter un avenir qui permette de garder vivante une poésie devenue vitale. En terme de moyens, j’estime que les aides sont réparties de façon très peu équitable. Certaines structures n’ont pas les aides qu’elles méritent alors que d’autres sont très subventionnées. J’espère que tous les acteurs pourront continuer à oeuvrer de la façon dont ils oeuvraient.

Tu penses que cela va induire des changements de mentalité ?

Je suis mal placé pour me positionner sur la façon dont les uns et les autres interagissent, j’ai vécu le confinement dans la forêt. On ne peut prétendre à une prise de conscience collective qui si l’on ramène le questionnement à l’échelle individuelle. Quand je décide d’organiser tel événement, est-ce que je crée du stress autour de moi, ou une zone d’ouverture qui va permettre de créer un rapport d’amour ? La question première est : « suis-je une personne libre ou pas ?». Chaque acte doit être posé dans cet élan, avec authenticité et de courage. Au-delà, si grâce à la culture, on pouvait avoir plus de solidarité dans notre ville, ce serait une bonne chose. En ce qui nous concerne, nos portes sont grandes ouvertes.

 

Site internet : Le Telegraphe