Frank Micheletti en solo

26.04 & 27.04 au Musée des Arts Asiatiques à Toulon.

 

Nous l’avons vu récemment en tant que chorégraphe et musicien. Cette fois-ci, au Musée des Arts Asiatiques, nous aurons l’occasion de le voir danser, entre autres, le vendredi soir. Et de découvrir un nouvel Out of the Box avec les étudiants du Conservatoire TPM.

 

Tu investis une nouvelle fois un lieu étonnant…
Le vendredi, l’événement « Rizière pop » se passera à l’intérieur et dans le magnifique jardin. Il démarre par un solo : je danse, performe et crée de la musique. Il est inspiré de mes séjours réguliers en Asie, particulièrement au Japon, en Indonésie, au Vietnam, en Thaïlande. La relation au lieu est comme toujours importante, ce lieu a des collections d’Asie remarquables. Puis, il y aura un DJ set, uniquement composé de musiques d’Asie, même si certaines n’auraient peut-être pas été associées à ces pays. Une grande partie des vinyles proviennent directement de mes voyages. Il y a des musiques traditionnelles mais aussi influencées par des sources extérieures, jusqu’à des musiques électroniques d’aujourd’hui. On sait peu par exemple que la scène de musique noise la plus importante au monde aujourd’hui est au Japon. Il y aura aussi de la pop thaïlandaise : le Molam, qui a eu sa période de gloire entre les années 50 et 70 et qui revient aujourd’hui. Pendant mes voyages j’ai toujours un enregistreur : ce sera baigné de sons de là-bas. Le samedi, ce sera « Out of the box #8 ». Je suis artiste associé pendant trois ans au Conservatoire TPM, à qui j’ai proposé ce programme. C’est un projet pluridisciplinaire avec des élèves danseurs, musiciens, théâtreux et circassiens. Nous sortons des scènes conventionnelles, pour que les élèves éprouvent leur discipline sur des sur mediums différents. Il y a eu le hall du Liberté, le site archéologique Olbia, le complexe nautique de Hyères, entre autres. Le rapport au public est également différent : il peut entourer les artistes, être dans une proximité. Depuis le début du programme, j’ai vu le jeu des élèves se transformer, c’est gratifiant. Ces Out of the box ont également un grand succès public. Là, ça s’appelle « Bizarre Bazar » : on pulvérise les frontières entre les disciplines et les différents pays d’Asie. C’est une chevauchée galopante sur les grands fleuves d’Asie, ce Mékong joyeux et tumultueux, qui traverse cinq pays.

Comment as-tu traduit ces thèmes en mouvements ?
En 2009, j’ai été résident de la Villa Kujoyama à Kyoto, une des deux résidences les plus cotées, avec la Villa Medicis de Rome. Tu peux créer un projet et t’inspirer longuement et durablement, c’est là que beaucoup de choses se sont mises en place. Depuis, je veux créer un solo, et pour l’anniversaire des dix ans, il est temps de le faire. En décembre, je suis retourné au Japon. Là-bas, le sentiment de soi est construit avec une notion plus large que l’individu, un rapport à l’invisible, aux autres mondes vivants… On récupère de l’énergie dans les éléments extérieurs, d’où l’animisme, les kamis (divinités shintoïstes ndlr). J’explore le thème du ona to otoko, le masculin/féminin, la frontière entre les genres, qui a plus de souplesse là-bas. Dans le kabuki, par exemple, tous les rôles sont joués par des hommes. Également le rapport à l’invisible, tout le réel n’étant pas visible, j’essaie de l’évoquer. Un autre registre de travail est cette forte relation avec les mondes végétaux et animaux, cela peut amener une nouvelle plasticité du corps. Les asiatiques ont aussi des notions de seuil entre les pièces très différentes, plus fortes qu’ici. Certaines techniques et gestes également ont pris une valeur importante. On peut citer l’art du thé, du tir à l’arc. Je vais essayer de suivre toutes ces inspirations-là, voir comment elles transforment mon imagination, mon rapport à l’espace-temps, à la gestuelle, à la musicalité. Et aussi comment je peux m’évader, sortir de mon bain culturel. Je pars de moi, mais partir de soi veut aussi dire s’éloigner de soi.

 

Site Officiel de la Compagnie Kubilai Khan