Grégory Granados – Design, musique, danse et temps

DESIGN

Après un DNAT obtenu à l’ESADTPM et un DNSEP à l’ESADSE, Grégory a marqué les esprits varois en obtenant le grand prix de la Design Parade en 2019. Il revient pour nous sur son parcours.

Dans ton nouveau projet, « Step », tu fais le pont entre design, musique, et formation…

J’ai étudié pendant cinq ans le travail du bois : ébénisterie, lutherie, menuiserie en siège, puis je suis allé à la Chelsea School of Art, et aux ESAD de Toulon et Saint-Étienne. En première année d’école d’art, j’avais une vision rigide du design, mais grâce à une rencontre avec Régine Chopinot et un stage chez les frères Bouroullec ces années m’ont petit à petit ouvert l’esprit. Step est né de tout cela, je questionne la musique et la danse, au-delà de l’aspect fonctionnel. C’est un instrument de musique tellement grand, et polymorphe, qu’il doit être utilisé à plusieurs. Ses éléments s’installent et s’organisent dans l’espace . Pour l’utiliser, tu peux courir, marcher, danser… Une question est sous-jacente : l’expérience de l’objet collectif permettrait-elle de fédérer une écoute mutuelle.

Juste après mon diplôme, j’ai pu bénéficier du dispositif « Création en cours » des Ateliers Médicis à Paris, qui permettait d’être en résidence dans une école primaire à Rians. Avec les élèves nous avons commencé à imaginer un instrumentarium : une bibliothèque d’instruments sonores. On a utilisé ce que l’on avait autour de nous, des plots, des boites de conserve et ça a fini en concert punk !

À travers Step j’essaie de démocratiser la question acoustique des matériaux de l’industrie : un tube d’acier quelconque, d’un certains diamètre et dimension, donne une note précise.

Aujourd’hui, mon intérêt pour la transmission m’a permis de devenir professeur à l’ESAD de Saint-Étienne.

Tu as une relation privilégiée avec la Villa Noailles…

C’est là où j’ai commencé. En tant qu’étudiant, j’y ai fait des vacations, comme médiateur pour les expositions, à partir de 2013. Ce fut un très bon moyen de développer une culture liée à l’objet, mais aussi au patrimoine, à la mode… J’y ai notamment compris les enjeux d’une scénographie. Et juste après il y a ce switch… ou je me suis retrouvé dans la position du lauréat de la Design Parade. Ce fut bien sûr un très grand tremplin, qui m’a permis de développer beaucoup de choses et de vivre de ce que je fais, c’est un privilège. Grâce à ce prix, j’ai eu la chance d’effectuer deux résidences.

À la Manufacture de Sèvres, j’ai réalisé le projet « Tiempo », où j’ai fabriqué un aléatronome en porcelaine. Le son de cette matière m’intéressait. Elle est très polymorphe, et a une sonorité particulière à chaque fois. J’ai fabriqué un outil qui interroge le temps, la pulsation. C’est arrivé à ce moment où le temps variait, suite aux confinements. La cloche produit des pulsations qui changent de rythme et nous invitent à tendre l’oreille. Au Cirva à Marseille, j’ai eu plusieurs périodes de résidence d’une semaine complète. Lors de ma première venue, je suis arrivé avec une pousse de plante, la Desmodium Gyrans : quand tu mets de la musique à côté d’elle, elle ondule ses feuilles. J’ai simplement voulu créer la plus belle maison pour cette plante, en verre soufflé. Dans ce projet il y a aussi ce rapport au temps, dans ce cas précis, un rapport à la matière qui joue entre gravité et temps. J’ai réalisé une série de germoirs puis une version vase quand la plante atteint son adolescence.

Que retiens-tu de ta scolarité à l’ESADTPM ?

En option design, j’avais deux professeurs : Olivier Millagou et Antoine Boudin. Je venais de l’artisanat qui conditionne une certaine façon de réfléchir. J’ai compris comment construire intelligemment un objet, une paire de lunettes, des chaises, des kayaks…

Venant de Normandie, j’étais émerveillé par le Var. À Toulon, il y a un fort rapport à la mer et à la nature : tu peux aller te baigner entre deux cours, réfléchir sous l’eau… J’y ai également rencontré des amis, avec qui je travaille toujours. Ce fut une grande étape de ma vie, qui m’a permis de me constituer et de m’émanciper d’une certaine manière. L’ouverture des pratiques m’ont permis de rencontrer Régine Chopinot, Isabelle Bourgeois et Jean-Marc Réol, que je remercie.

Fabrice Lo Piccolo

BIOGRAPHIE

Originaire de Normandie, Gregory Granados commence ses études par cinq ans de formation dans le monde du bois en ébénisterie, menuiserie en sièges et lutherie. Au travers d’une initiation au design à la Chelsea school of arts à Londres, il décide d’en faire son métier.

En 2013, c’est par le biais d’une rencontre avec la chorégraphe Régine Chopinot à Toulon que son intérêt pour la danse est venu. Depuis ce jour il continue de travailler avec la chorégraphe. Après avoir obtenu son DNSEP en 2018 Gregory à eu la chance d’être lauréat du dispositif Création en Cours 2018 organisé par les Ateliers Médicis, du festival Design Parade 2019 organisé par la Villa Noailles ainsi que des Grands Prix de la Création de la Ville de Paris 2020 organisés par les Ateliers de Paris.

Aujourd’hui Gregory enseigne à l’ESADSE et continue d’investiguer les champs de la danse et de la musique par l’intermédiaire du design.

Publié le 10 mars 2022