La Chica – Créer et vibrer ensemble.
La Chica x El Duende Orchestra, au Théâtre de l’Esplanade à Draguignan le 7 mai.
Avec El Duende Orchestra, La Chica donne corps à une musique de l’âme et du feu. Une création puissante à travers laquelle ils font vibrer l’intime sur scène, rendant hommage aux puissances invisibles et transformant la mémoire en matière sonore. Un concert programmé en collaboration avec Tandem Smac.
Comment est née cette collaboration avec El Duende Ochestra ?
Elle est née d’un lien intime et personnel : l’amour, le deuil, la musique. Avec Marino Palma, qui dirige l’orchestre, on se connaît depuis longtemps. Et quand j’ai perdu mon frère, puis lui son père peu après, on s’est retrouvés. Marino m’a proposé de réarranger certaines chansons de mon album hommage à mon frère, pour orchestre. Il est pianiste et arrangeur, alors ça coulait de source et j’ai tout de suite dit oui. Ce projet, c’est notre manière de transformer la mort, de ne pas rester figés dans la douleur, mais d’en faire une expérience artistique et collective.
Vous avez longtemps joué en piano-voix. Que vous apporte cette nouvelle configuration orchestrale ?
C’est une vraie bascule. Passer de la solitude du piano à une scène à douze, c’est comme passer de l’introspection à une énergie de groupe très puissante. On est dans quelque chose de vivant, de vibrant. Le son devient organique, presque tribal. Ça m’a permis de comprendre que je pouvais être portée, soutenue, au lieu de tout affronter seule. Et ça change aussi la nature du spectacle : on reste dans quelque chose de profond, mais il y a plus de joie, de lumière, de lien.
Dans votre démarche, il y a une forte dimension spirituelle, presque chamanique. Vous l’assumez ?
Oui, totalement. Pour moi, la musique a un pouvoir de transformation, de guérison. Elle altère nos états intérieurs. Je ne parle pas de mysticisme, mais d’une forme de médecine émotionnelle. Sur scène, mon objectif, c’est la transe. Pas au sens spectaculaire, mais dans l’idée de lâcher prise. Si nous, on lâche, le public peut lâcher. Et c’est là que quelque chose de magique se passe. La spiritualité, je l’ai héritée autant de ma culture vénézuélienne que de ma vie en France, notamment en Bretagne. Ce sont des racines qui m’ont toujours fait vivre les rituels comme quelque chose de naturel.
Quels retours recevez-vous du public ?
Ils sont souvent bouleversants. Beaucoup de gens nous disent qu’ils ont pleuré, qu’ils ont senti un apaisement. On vit dans une époque saturée d’informations, de violences, de responsabilités émotionnelles qu’on nous fait porter malgré nous. Ce spectacle, c’est une parenthèse, un moment pour respirer, pour se recentrer. Je fais ça d’abord pour moi, mais si d’autres veulent monter à bord, tant mieux. Et jusqu’ici, les retours ont toujours été d’une grande douceur, d’une vraie reconnaissance. Mais il n’est pas toujours facile de trouver des lieux qui comprennent pleinement notre démarche. D’ailleurs, je tiens à remercier Tandem et Théâtres en Dracénie de nous donner la possibilité de nous produire chez eux.
Ce projet orchestral est-il une parenthèse ou une nouvelle direction ?
C’est un chapitre entier. Ça fait plus de deux ans qu’on le joue. En parallèle, je prépare un nouvel album, avec une autre énergie. Mais l’orchestre continuera, sous d’autres formes. J’ai besoin de bouger, de me métamorphoser. Le deuil, c’est un processus infini. Il évolue, comme moi, comme la musique. Et ce que je vis aujourd’hui, c’est justement ça : une métamorphose, pas une renaissance.
Julie Louis Delage