L’Impératrice – Son et sens.

Festival Rade Side – Toulon – Tandem
Le Liberté Scène Nationale – Jeudi 7 octobre

“J’voudrais pas qu’on m’voit floue, pour les interviews”. C’est ce qu’écrit L’Impératrice dans “L’équilibriste”, titre issu du nouvel album que vous découvrirez en live à Toulon pour le festival Rade Side. Alors, voici une vision bien nette de Flore, la talentueuse chanteuse du groupe.

Cet album propose une rupture formelle. Qu’avez-vous changé dans votre style ?
Le fait d’avoir beaucoup tourné à l’étranger après le premier album « Matahari » a énormément influencé notre musique, notamment avec plus d’influences californiennes. Il y a des morceaux où tu ne comprends pas où on va aller, avec des breaks, des changements harmoniques…
On a décidé de faire zéro compromis, d’arrêter d’avoir peur de perdre nos auditeurs parce que “c’est pas radio”. On a aussi changé de processus de composition. Avant, on composait à partir de jams, on enregistrait en live, l’énergie était assez brute. Cette fois, on a tout fait à l’américaine, de façon très produite, en binômes. Chacun ajoutait son instrument par-dessus l’autre et moi le texte à la fin. Sur le premier album, j’écrivais beaucoup avec Charles, le leader. Le but, c’était de faire groover le français qui est une langue rugueuse. Tout n’avait pas de sens, mais on le revendiquait. Là, c’est plus personnel, proche de ce que je suis, du réel. J’ai rencontré un rappeur de mon label, Fils Cara, et il m’a vachement aidé pour les titres “Fou” et “Hématome”. Il dit qu’avec moi, il a fait un processus maïeutique. Les rappeurs concilient le son et le sens.

En écoutant les paroles, on retrouve souvent l’idée de la peur de passer à côté de sa vie sans être honnête dans son identité et ses relations. Qu’en pensez-vous ?
C’est ça, il y a plusieurs morceaux qui parlent de ça. “Hématome” aborde la façon dont on vit une rupture amoureuse à l’heure des réseaux sociaux. C’est difficile de devenir invisible et de faire disparaître quelqu’un de sa tête. On a reçu beaucoup de messages de personnes qui ont été touchées par ce texte.
Il y a aussi “Submarine” qui parle du droit à être triste et vivre ses émotions négatives pleinement, sans honte. “Peur des filles”, c’est une chanson qui parle de notre génération. Mais j’essaie de toucher toutes les générations à travers des histoires propres à notre époque, très contemporaines.

Entre le visuel de la pochette et le titre de l’album, vous communiquez une forte influence japonaise dans ce projet, pourquoi ?
On aime beaucoup ce pays, mais on n’a pas eu la chance d’y jouer. On a des références visuelles, cinématographiques, mais surtout musicales : la city pop japonaise est une grande influence pour nous. Je ne dirais pas que c’était un moteur dans la création de l’album, mais un concours de circonstances. Ugo Bienvenu, qui a fait la pochette de l’album, est un illustrateur qu’on adore, il a ce côté dystopie politique dans lequel on se retrouve pas mal. Le titre de notre nouvel album est “Tako Tsubo” qui est une déformation du cœur dûe à une intense émotion et qui veut aussi dire en japonais « piège à poulpe ». On a beaucoup aimé son interprétation visuelle avec le mythe des Moires : trois divinités grecques qui décident du destin des hommes en tenant le fil de la vie. Elles peuvent l’arrêter à n’importe quel moment avec un coup de ciseaux.

Quel est votre ressenti sur cette tournée ?
Après un an et demi sans concert, la tournée était attendue. On était trop content de reprendre à Saint Pétersbourg en juin et en festival devant des foules importantes. Un groupe qui sort un album et qui ne peut pas monter sur scène le défendre en live, c’est un risque énorme, surtout qu’on est dans un label indépendant avec un petit réseau, donc c’était une libération intense.
Au premier concert, on a tous pleuré !

Maureen Gontier

Octobre 2021

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