RÉMY BRÈS-FEUILLET – Baroque, castrats et rock stars

>>Le 18 juillet à la Collégiale Saint-Pierre à Six-Fours-les-Plages

Dans le cadre de La Vague Classique, le contre-ténor Rémy Brès-Feuillet se produit avec l’ensemble Matheus sous la direction du chef d’orchestre Jean-Christophe Spinosi. Rencontre avec un jeune artiste qui a déjà incarné de nombreux rôles sur scène, en France et à l’étranger.

Comment la voix de contre-ténor est-elle apparue ?
La voix de contre-ténor s’est développée au moment où les castrats ont disparu, même si ces deux types de voix ont cohabité aux XVIIe et XVIIIe siècles. Il faut rappeler que les castrats, à leur époque, étaient de vraies rock stars. L’ablation assez grave qu’ils avaient de leurs parties intimes faisait que leur voix s’était développée différemment de celle des autres garçons, et qu’elle était extraordinaire. Au moment où cette pratique a cessé, les contre-ténors, qui étaient issus des chœurs, ont repris l’emploi tenu par les castrats. À l’opéra, le contre-ténor chante de manière plus aiguë que le ténor, avec une autre technique vocale : il utilise sa voix de tête tandis que le ténor utilise sa voix de poitrine.

Quand avez-vous découvert votre don ?
J’ai commencé l’accordéon à l’âge de quatre ans, j’en ai joué pendant dix ans, ce qui m’a permis de découvrir un répertoire éclectique, notamment la musique pop et le jazz. C’est au travers de cette musique que j’ai commencé à chanter avec ma voix de tête, parce que ce défi m’amusait. Ces chants étaient inspirés de Queen, Freddie Mercury, Prince. Grâce à mes professeurs de chant, j’ai pu par la suite découvrir la particularité de la voix de contre-ténor et le répertoire de prédilection qui y est rattaché : la musique baroque. C’est sur la base de cette voix de tête que j’ai pu travailler la couleur et la rondeur de la voix de contre-ténor.

Pourquoi avoir intitulé votre concert « L’ange et le diable » ?
C’est un clin d’œil de Jean-Christophe Spinosi à ma personnalité. Je suis quelqu’un de calme, mais les castrats interprétaient généralement des rôles de héros, de personnes augustes, ou alors d’antihéros, de guerriers méchants. Les livrets de l’époque reposaient sur ce manichéisme, il y avait toujours les forces du mal contre celles du bien. Ce titre est une approche intéressante pour aborder l’histoire des castrats.

Qu’allez-vous interpréter ?
Principalement de la musique baroque, et de la musique du XVIIIe siècle, car c’est à cette époque que l’opéra seria a connu ses lettres de noblesse et que les plus grands compositeurs, comme Haendel, Vivaldi, Porpora ou Scarlatti, ont travaillé avec les castrats les plus en vue. On a pris le parti de se concentrer sur l’un d’entre eux, Senesino (1686-1758). On a voulu offrir au public une sorte de voyage, d’oratorio imaginaire autour de ce personnage. Mais c’est un concert plein de surprises, de sucreries, qui croise aussi la route de Farinelli (1705-1782).

Que partagez-vous avec Jean-Christophe Spinosi et l’ensemble Matheus ?
Jean-Christophe est quelqu’un qui a de nombreuses références, cinématographiques, picturales, c’est très nourrissant pour moi en tant que chanteur. Ces références de pop culture, si j’ose dire, alimentent mon interprétation. Jean-Christophe est comme un mentor, et l’ensemble Matheus, un refuge, le lieu de toutes les expérimentions possibles. Les musiciens y sont flexibles, curieux. Jean-Christophe nous pousse à interroger notre rapport à la musique. Il a des idées scéniques, des idées sur l’interprétation : ce n’est pas qu’un chef d’orchestre, c’est un artiste complet en charge du spectacle global.
Dominique Ivaldi

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