T. Candilis & B. Campan Une symbiose entre réalisateur et acteur.
>>L’enfant qui mesurait le monde, en salles.
Takis Candilis a adapté le livre « L’enfant qui mesurait le monde » de Metin Arditi, présenté en avant-première au Pathé Toulon en présence de Bernard Campan. Le public conquis a offert une standing ovation. Nous avons eu le plaisir de les interroger.
Comment vous est venue l’idée d’adapter le livre de Metin Arditi au cinéma ?
Takis : Il y a plus de quarante ans, j’ai fait du cinéma. Puis je suis passé à la télévision où j’ai été producteur et j’ai accompli de nombreuses choses. Mais depuis je n’avais jamais envisagé de revenir au cinéma. En lisant ce livre, je suis tombé complètement amoureux de l’histoire. Il m’a permis de revisiter mes origines et de replonger un peu dans mon ADN. De plus, certains détails du livre m’ont profondément touché et bouleversé, ce qui m’a donné envie d’adapter ce personnage.
Bernard, qu’est-ce qui a fait que vous avez accepté ce rôle ?
Rencontrer Takis a été une véritable découverte et j’ai tout de suite trouvé le scénario superbe. C’était un très beau rôle, il aurait fallu être fou pour refuser un tel film. Vous savez les films vous choisissent autant que vous les choisissez. Moi, je m’abandonne à ces choses-là. Quand j’écoute parler Takis, je ressens des liens entre nous. On lui a demandé, à un certain âge, de participer à un documentaire sur les Grecs en France, et il s’est demandé pourquoi. Ça me touche. Il faut parfois une vie entière pour se rendre compte de choses évidentes. Il y a des choses que la vie me permet de découvrir petit à petit à moi aussi.
Alexandre est un personnage assez froid au premier abord, qu’est-ce qui vous a attiré chez lui ?
Bernard : Justement la complexité du personnage. Cette reconstruction, cette résilience dont il va faire preuve durant le film. J’ai eté touché par l’histoire de ce personnage. Il ne se rend pas compte qu’ en s’éloignant de sa fille, il est en train de passer à côté de sa vie. Il s’est également éloigné de ses convictions, de sa vocation d’architecte, de ses racines, etc. Et puis le fait de jouer un grand-père alors que je ne le suis pas dans la vie m’a fait plaisir. Je me suis dit : « Ah, enfin un rôle de grand-père, je trouve ça formidable. ».
Takis, pourquoi avoir fait ce choix de garder les dialogues en plusieurs langues et de sous-titrer plutôt que de les franciser ?
Je voulais vraiment que le film soit ancré dans la réalité. Quand il arrive en Grèce, Alexandre est aussi paumé qu’on peut l’être lorsqu’on ne parle pas un anglais fantastique ou qu’on rencontre des gens qui parlent uniquement grec. Je voulais garder cette barrière linguistique intacte, où il était obligé à chaque fois de jongler avec différentes langues pour essayer d’atteindre ses objectifs. Cela ajoutait à l’authenticité et à la complexité de son parcours dans le film.
Est-ce que Metin Arditi a vu le film ?
Takis : Oui et il joue même dedans ! Au début j’hésitais à lui donner le scénario. Dans ma carrière j’ai travaillé avec de nombreux auteurs, et dès que l’on souhaitait modifier ne serait-ce qu’un peu le texte, cela devenait compliqué. Pour ce film, je rencontrais Metin une fois par mois dans son hôtel à Paris, on discutait : il était très poli, il attendait, il écoutait. Au bout d’un certain temps, je me suis dit : « Bon, il va falloir que je lui fasse lire quelque chose. » Et je lui ai dit : « Bon, tu vas peut-être me maudire, mais bon, tiens. » Et je lui ai tendu le scénario. Il m’a appelé quelques jours après et il m’a dit : « C’est formidable, je suis très content : on peut librement adapter un livre mais il ne faut pas faire de contresens. Et là, il n’y en a pas. »
Julie Louis Delage