Vincent Peirani – Un accordéon au service de la musique.

L’accordéoniste Vincent Peirani, dans son nouveau projet «Jokers», se produit en trio avec ses complices Federico Casagrande, à la guitare, et Ziv Ravitz à la batterie. Un projet où ils brouillent les pistes et qu’ils nous dévoileront au crépuscule dans le superbe écrin de nature et de culture qu’est Châteauvallon Scène Nationale.

Pourquoi avoir choisi l’accordéon comme instrument ?

J’ai toujours voulu faire de la musique. Au départ, je voulais faire de la batterie mais mon père m’a imposé l’accordéon car il adorait cet instrument. Je n’étais pas motivé du tout, je pleurais pour arrêter. Puis je m’y suis habitué. Pendant deux ou trois ans, j’ai découvert le répertoire classique et un nouveau monde s’est ouvert à mes oreilles. Mon père a été malin : il m’a appris que l’on pouvait jouer du classique à l’accordéon et m’a emmené voir celui qui est devenu mon professeur. Il possédait un accordéon immense… Il m’a joué du Bach et du Mendelssohn. Ce qui en sortait me faisait penser à tout sauf à de l’accordéon. Ma curiosité était attisée et je me suis finalement passionné pour cet instrument. La musique m’a toujours habité. Inconsciemment, je suis passé de vingt minutes de répétition par jour à cinq heures. C’est comme cela que j’en ai fait ma profession.

Votre nouveau projet s’intitule « Jokers », pourquoi ce nom ?

Le joker, dans un jeu de cartes classique, permet de remplacer une autre carte. Nous sommes un trio au sein duquel chacun de nous peut prendre la place de l’autre. Le guitariste est hybride : deux cordes pour jouer la basse et quatre cordes pour la guitare électrique, il se dédouble lui-même. Nos trois individualités se multiplient et s’échangent. Il y a eu également un phénomène « Joker » avec le film du même nom, qui est très ambigu également, et ça a donné encore plus de sens à ce projet.

Vous jouez de nombreux styles musicaux, pour quelle raison ?

Je suis originaire de Nice. On ne joue pas d’accordéon là-bas. Beaucoup de personnes me regardent de travers (rires). J’ai grandi avec Nirvana, Led Zep, Deep Purple, Jimi Hendrix. Avec mon instrument, je pensais ne jamais pouvoir jouer cette musique. Finalement je me suis lancé, et j’ai commencé à jouer du Deep Purple, du Rage against the machine… Je jouais par dessus le disque, j’adorais ! C’est par cet instrument que je souhaite m’exprimer et non par un style précis. J’ai aussi fait de nombreuses rencontres qui m’ont permis de toucher à tout : flamenco, hip-hop, électro. J’ai même eu un groupe de trash metal, nous faisions beaucoup de bruit ! En tant que musiciens pour trouver sa voie il faut essayer sur plusieurs chemins.

Vous avez composé pour le film « Barbara » de Matthieu Amalric, c’est un exercice difficile ?

Ce qui est intéressant c’est le rapport à l’image. On pense que cela va nous aider, mais parfois les réalisateurs se retrouvent avec une musique qui exprime le contraire de ce qui se déroule à l’écran. J’avais un petit rôle dans le film, j’étais donc très impliqué, et avais bien intégré l’histoire. Le rapport à l’image est grisant. On doit en même temps être au service de la musique et de l’image, l’équilibre est très fin, et le rendu peut parfois nous surprendre.

Qu’allez-vous proposer à Châteauvallon ?

C’est du jazz, mais le jazz est devenu une grande famille, avec de nombreuses influences différentes. Je faisais écouter un extrait de « Jokers » à un ami et il m’a dit : c’est du jazz ça ? D’autant plus qu’il existe plusieurs styles de jazz. Nous avons des influences très diverses : on va passer d’une chanson traditionnelle italienne à un morceau de Jeff Buckley. On prend les gens par la main, mais ils se dirigent eux-mêmes avec nous. Il y a beaucoup de couleurs, de sons, d’ambiances différentes, qui nous ressemblent. J’ai un parcours éclectique et j’aime le retranscrire dans les concerts.

Lien événement Châteauvallon : Jokers

Vincent Peirani – Jokers – Dream Brother (Jeff Buckley cover)

© JP Retel