Yohan Rimaud – Dans la lumière de Rembrandt.
Le Phare Rembrandt », au musée des Beaux-Arts de Draguignan, jusqu’au 15 mars
Yohan Rimaud est Conservateur en chef et directeur du musée des Beaux-Arts de Draguignan. Il est également commissaire de l’exposition “Le Phare Rembrandt“, où l’on peut découvrir des œuvres du Maître, mais également de certains peintres français qu’il a inspirés ou qui l’ont soigneusement copié. Une visite pour comprendre pourquoi Rembrandt (1606 – 1669) a une place si importante dans l’histoire de la peinture à travers le temps, et surtout au XVIIIè siècle.
Comment devient-on conservateur de musée ?
En France, pour devenir conservateur de musée, il faut passer un concours de la fonction publique. Ce concours permet d’accéder à une formation de l’Institut National du patrimoine et, au terme de cette formation, on devient conservateur du patrimoine. Traditionnellement, il y avait une école qui formait à ce concours, les candidats venant de l’École du Louvre de Paris, mais depuis quelques temps, il y a davantage de conservateurs qui, comme moi, ont pris d’autres voies. J’ai fait des études de science politique, puis des études sur l’Histoire de l’Art à l’université entre Aix-en-Provence et Rome. Je ne suis donc pas très représentatif de la voie principale, mais dans ce concours, la plupart des épreuves concernent évidemment l’Histoire de l’Art…
L’idée de cette exposition sur Rembrandt, sa place de Maître ayant inspiré d’autres grands peintres, surtout au XVIIIè siècle, d’où vient-elle ?
Tout d’abord, je travaille depuis plusieurs années sur différentes questions liées au XVIIIè siècle, période qui m’intéresse beaucoup et, comme d’autre personnes passionnées par ce moment d’histoire, je me suis rendu compte qu’il y avait pas mal d’œuvres qui montraient que les artistes de cette époque avaient un intérêt marqué pour des œuvres de Rembrandt. Par ailleurs, comme j’essaie d’articuler les expositions pour qu’elles soient liées au musée où elles se déroulent, et qu’il se trouve que dans les collections de Draguignan, il y avait deux tableaux qui furent longtemps attribués à Rembrandt, dont un qui a été volé, puis retrouvé, et qui ont finalement perdu leur attribution à Rembrandt, cela m’a donné envie d’expliquer ce phénomène : pourquoi en France au XVIIIè siècle a-t-on fait des tableaux qui ressemblent à des Rembrandt, mais qui n’en sont pas ?
Fait-on facilement la différence entre copies et toiles inspirées par Rembrandt ?
Dans l’exposition, nous retrouvons des artistes que nous identifions parce qu’ils signent par leur nom, ou bien par leur façon de peindre caractéristique, comme Fragonard. Puis, il y a des tableaux comme ceux cités plus haut, que l’on croyait être des Rembrandt, et qui sont très difficiles à dater entre XVIIè ou XVIIIè siècles, car la technique, les pigments étaient à peu près les mêmes. Mais nous avons surtout réussi à réunir des œuvres, à obtenir des prêts assez exceptionnels, qui font que cet évènement est unique et ne pourra jamais être remplacé par une expérience virtuelle.
On entre rarement dans un musée par hasard, mais cette exposition est-elle facilement accessible aux personnes sans connaissances particulières sur l’histoire de l’art ?
Rembrandt est un nom qui parle au plus grand nombre. Le sujet de l’exposition peut paraître un peu pointu, mais quand Rembrandt a été découvert en France, après sa mort, on savait peu de choses sur lui. C’est la même chose pour des personnes qui entreraient par hasard dans le musée aujourd’hui. L’approche de l’exposition est surtout de laisser son œil se promener d’un tableau à l’autre, découvrir avec un regard presque vierge les peintures, la façon dont elles sont exposées, d’exercer son œil en lui faisant confiance et d’y prendre plaisir. Nous avons également des outils, comme un petit journal, des textes, ou des jeux pour accompagner le public et rendre l’exposition accessible à tous, mais cela n’a rien d’un dispositif scolaire, c’est plutôt l’idée de ressentir des émotions qui est encouragée.
Weena Truscelli