Yulianna Avdeeva – Le piano est ma voix.

Le 20 juin à La Maison du Cygne

Lauréate du Concours Chopin, la pianiste russe revient à son compositeur fétiche – elle vient d’ailleurs d’enregistrer un album de certaines de ses œuvres – pour un récital d’exception à la Maison du Cygne le 20 juin.

Pourquoi avez-vous choisi le piano ? Quel est votre lien avec votre instrument ?
Mes parents avaient un piano à la maison. Ils étaient mélomanes, allaient souvent à des concerts, et un jour ils m’ont entendue essayer d’en jouer toute seule. C’était une évidence : ce serait le piano, et rien d’autre. En Russie, c’est l’instrument-roi.
Ce que j’aime, c’est sa capacité à tout exprimer : la voix humaine, un orchestre, une immense palette sonore. Pour moi, le piano, c’est ma voix. C’est un partenaire essentiel, un canal, une manière de dire qui je suis. J’aime beaucoup jouer avec d’autres instruments, mais chaque piano est comme une rencontre : parfois, on trouve immédiatement un langage commun.

Vous avez remporté le Premier Prix du Concours Chopin en 2010. Votre programme à Six-Fours est consacré à ce compositeur. Qu’est-ce qui vous touche chez lui ?
Chopin est un compositeur absolument unique. Il a écrit presque exclusivement pour le piano, et il l’a transformé en quelque chose de profondément expressif. On dit souvent de lui qu’il est « la voix du piano » – et c’est vrai. Il fait chanter l’instrument. Pour moi, jouer Chopin est toujours un moment émouvant, il a une place toute particulière dans mon cœur. C’est un langage intime, subtil, qui parle directement à l’âme.

Quel est le programme que vous jouerez à Six-Fours ?
C’est un parcours à travers différentes périodes de la vie de Chopin, avec certains morceaux que j’ai enregistrés sur mon album « Voyage ». Il y aura la « Barcarolle » et la « Fantaisie en fa mineur », deux œuvres tardives, très personnelles. La « Barcarolle » évoque le chant sur l’eau – elle s’inspire de Venise, bien que Chopin n’y soit jamais allé. Et pourtant, il parvient à capturer ce mouvement, cette fluidité… c’est une œuvre d’une grande beauté. Je jouerai aussi des pièces plus anciennes et du milieu de sa carrière : Scherzos, Préludes, Nocturnes, et la « Polonaise brillante ». Chopin adorait les danses traditionnelles polonaises comme les mazurkas ou les polonaises. En deuxième partie, je jouerai l’intégralité des Vingt-quatre Préludes.Ce sont vingt-quatre miniatures, vingt-quatre visages, vingt-quatre émotions : courts, mais d’une densité incroyable. À eux seuls, ils résument tout le génie de Chopin : dire l’essentiel dans une forme rigoureuse et lumineuse.

Ce récital aura lieu en plein air, dans les jardins de la Maison du Cygne. Ce cadre vous inspire ?
C’est une expérience très particulière, de jouer dehors. Ce n’est pas comme une salle de concert : on entend le vent, les oiseaux, on est en contact direct avec la nature. C’est plus imprévisible, mais aussi plus poétique. Cela donne une autre résonance à la musique.

Vous avez enregistré de nombreux albums. Préférez-vous le studio ou la scène ?
Pendant longtemps, j’ai préféré la scène. Il y a cette intensité du moment présent, cette connexion avec le public, l’énergie dans la salle. Mais avec le temps – et grâce à des artistes comme Gidon Kremer – j’ai appris à aimer le studio. L’enregistrement permet d’explorer, de prendre des risques qu’on ne prendrait pas en concert. C’est une autre forme de création, plus introspective, mais tout aussi passionnante. Et puis, on travaille avec une équipe formidable, c’est une aventure collective.

Fabrice Lo Piccolo

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