Alain Fleischer, la beauté doit remonter des profondeurs.

Je ne suis qu’une image – Jusqu’au 24 juin – Hôtel Départemental des Arts – Toulon

 

Alain Fleischer a réalisé quelques trois-cent cinquante films, écrit des dizaines de romans, il est plasticien, photographe, et dirige Le Fresnoy – Studio National des arts contemporains à la demande du ministère de la culture. L’Hôtel des Arts lui consacre une exposition

 

 

L’exposition à l’Hôtel des Arts porte le titre d’une de vos dernières œuvres, je ne suis qu’une image, consacrée à la représentation graphique d’une bande sonore de film, peut-on considérer cette œuvre comme un condensé de vos préoccupations ?

 

C’est en effet une œuvre où se manifeste parfaitement l’intérêt que je porte aux transferts des formes sur des supports successifs, tandis que le message contenu doit se maintenir, quitte à se transformer. Au cinéma, ce qui est d’abord une bande son magnétique, devient bientôt un signal optique, sur le bord de la bande image, avec toutes les caractéristiques d’une image photographique : définition, netteté, contraste, grain, etc. Cette image peut être ensuite reproduite aussi bien manuellement que via des interfaces numériques

 

Vous présentez de nombreux montages, l’intention précède-t-elle le choix d’un montage ou la possibilité d’un montage crée-t-elle l’intention ?

Il n’y a pas vraiment montage au sens où tout se joue à la prise de vue sans aucune manipulation ni intervention ultérieure. Il y a le plus souvent superposition d’une image par projection sur un support nouveau, ou apparition d’un reflet. Le projet, avec son dispositif technique précède toujours la réalisation et son résultat, mais ma démarche est généralement expérimentale, avec tout ce que cela comporte de risques et d’incertitudes.

 

Certaines de vos œuvres présentées sont purement esthétiques, mais la plupart transmettent un message, quel aspect privilégiez-vous ?

Ce qui compte pour moi, c’est la justesse que prend la forme par rapport au contenu. Il n’y a pas de réussite esthétique en soi. Il faut qu’une beauté apparue à la surface soit remontée d’une profondeur.

 

Vous êtes écrivain, cinéaste, plasticien, photographe, est-ce une façon de renouveler l’intérêt ou simplement une nécessité artistique par rapport à une intention ?

 

Je n’ai jamais su renoncer à la diversité des moyens d’expression. Chacun me permet non seulement d’exprimer des choses différentes, mais d’être moi-même un autre. Celui qui écrit n’est pas tout à fait le même que celui qui filme, et ce dernier n’est pas tout à fait le même qui fait des photographies ou des installations. Pour chaque projet, un langage s’impose.

 

 

Votre compagne Danielle occupe une place clé dans l’inspiration, la mise en place, la fabrication de vos œuvres, muse à la façon d’Antonioni, que vous citez, ou compagne de jeu ?

 

Il est important pour moi de ne jamais séparer l’activité de création et la vie privée. Jadis, les peintres prenaient leur compagne pour modèle. Aujourd’hui, cela existe encore chez les cinéastes et les photographes. Par ailleurs, il est certain que j’aime la dimension ludique d’une œuvre et qu’il est plus agréable de jouer à deux.

 

 

Vous dirigez Le Fresnoy-Studio National des arts contemporains, une école développée à la demande du ministère de la Culture, la transmission vous est-elle nécessaire ?

 

On a parfois dit que le Fresnoy produisait des petits Fleischer, cela me semble faux. Je n’ai pas de goût pour la paternité mais j’ai une vraie passion pour la transmission avec une riche expérience de pédagogue, qui a probablement déterminée la commande qui me fut faite par le ministère de la Culture d’imaginer le projet du Fresnoy comme une école renouvelant l’enseignement de l’art.

 

 

« Je ne suis qu’une image » à l’Hotel des Arts