Alexandra Cismondi – Pour les adolescents, et pour leurs parents.

Hors-Série Tisot 2023   

Il faudra que tu m’aimes le jour où j’aimerai pour la première fois sans toi

Le 4 février aux Châpiteaux de la Mer à La Seyne

Sur scène deux parents, leurs deux adolescentes, un gâteau, une bougie impossible à souffler. Et les mots qui se rejouent, en boucle. Qu’est-il arrivé à cette famille ? Et dans quel monde ?

Comment as-tu eu l’idée de ce spectacle ?
Des jeunes qui prennent des armes et tuent, je n’arrive pas à le déglutir. Suite aux attentats du lycée M.S. Douglas Parkland USA puis ceux du Bataclan, que j’ai vécus de près, j’avais besoin d’écrire. Je travaillais déjà avec des jeunes et j’ai eu besoin d’aller encore plus loin dans la rencontre. Qui sont les adultes de demain ? On est dans un gros désert socio-affectif, politique aussi, et parfois j’ai peur pour eux. On rit de l’absurdité du monde qui nous entoure, est-ce si drôle ? Quand un élève prend une arme pour descendre ses camarades, qu’advient-il de ceux qui restent ? Comment sort-on d’un deuil et que fait-on de nos fantômes ? Nous sommes tous des rescapés de quelque chose.
Je voulais aussi travailler en atelier avec des jeunes sur le thème « Violence, premières fois, ado », comparer mon adolescence à la leur et à celle de nos parents. En lieu et place : trois confinements. Châteauvallon-Liberté qui me soutient me propose alors une résidence, j’ai cette idée mais n’ai encore rien écrit ! J’appelle trois comédiens avec qui j’ai envie de travailler et leur dis : « j’ai envie d’écrire sur l’adolescent et le monde de demain, je voudrais que ce soit une famille au plateau et qu’on s’amuse à interpréter plusieurs personnages. Est-ce que vous avez cinq jours de libres en décembre ? Je n’ai pas de texte ». Et c’est comme ça qu’un mois plus tard m’ont rejoint Lou Chauvin, Anne-Elodie Sorlin et Christophe Paou.

C’est donc un spectacle qui avait un fil conducteur mais qui s’est écrit au fur et à mesure ?
Exactement, et ils m’ont fait confiance. Ça m’a filé les chocottes. Ce sont de grands comédiens qui m’ont dit immédiatement oui. J’ai écrit deux scènes. Et je me suis dit je vais faire comme ça, je vais écrire, on va se voir, on va travailler, on va faire des scènes, je vais lancer des sujets, les pousser dans des situations… On s’est apprivoisé, ils sont restés et on a créé un truc extraordinaire ensemble. Le reste de cette équipe fabuleuse s’est constitué autour de nous, Guillaume Mika en conseil dramaturgique, Camille Duchemin en scénographe, Shadé Mano à la régie lumière et Cyril Colombo et Benoît Olive à la création son.

Est-ce qu’on y retrouve des moment de ton adolescence ?
Dans les caractères des personnages certainement. C’est un spectacle qui, je trouve, me ressemble dans le sens où c’est celui qui est le plus proche de ce que je suis en tant qu’artiste.

Tu envisageais un spectacle atelier avec un public complice, tu as réussi ?
Je ne peux malheureusement pas tout dévoiler mais le public va rentrer dans le salon de cette famille, dans la cour d’école de ce lycée, au beau milieu de ce monde qui n’est pas tout à fait le nôtre mais pas tout à fait différent du nôtre. La pièce, comme une tâche d’encre, déborde dans le public.

A quoi doit-on s’attendre le 4 février ?
Un saut dans le vide, un big bang bourré d’éclats de rires et quelques larmes, un truc qu’on va faire ensemble.

Et après ?
Un film coécrit avec Julie Fournier, « Askip », une série surFrance 4, « L’Affaire Harry Crawford » au Théâtre… Et j’espère une immense tournée pour « Il faudra que tu m’aimes le jour où j’aimerai pour la première fois sans toi ».

 

Julie Delage

 

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