Benoît de Souza – Voyage au coeur de la transmission.

>>Exposition jusqu’au 2 juin, quai de Gaulle à Bandol

Enseignant et intervenant d’art thérapie en hôpital psychiatrique, Benoît de Souza est un artiste pluridisciplinaire pour qui la transmission est une priorité. Il présente jusqu’au 2 juin son Grand Cabinet des curiosités sur le Quai de la promenade de Gaulle à Bandol.

Comment le recyclage a-t-il influencé vos créations ?
Ma mère travaillait pour la coopération française au Bénin, où je suis né. Quand elle rentrait en France, elle nous ramenait des calissons, mais il était hors de question qu’elle nous ramène des jouets en Afrique. Il fallait qu’on s’intègre avec les enfants du village, qu’on s’adapte à leur mode de vie. On a appris à fabriquer des voitures en coupant des bouchons de liège, à plier des cannettes de Coca. J’ai commencé à creuser des trous pour ramasser de la terre argileuse et travailler la latérite. Toute cette diversité de matériaux m’a permis de développer mon acuité manuelle. Ma mère était botaniste, elle dessinait ses plantes pour faire des herbiers. Elle m’a appris à être précis avec mes mains parce qu’elle espérait que je devienne chirurgien, mais la vue du sang et des corps ne me plaisait pas. Mes parents ne voulaient pas que j’aille en école d’art, mais quand j’ai découvert la porcelaine à Limoges j’ai décidé de faire des études techniques. En céramique industrielle, on apprend à faire des prothèses, de la vaisselle, des techniques artistiques, tout en étant sûr de trouver du travail. Aujourd’hui, je fais des expositions pour des collectivités et je réalise des flacons pour L’Occitane en Provence.

Comment se construit la mythologie de vos personnages ?
Le métissage se ressent dans mon travail. Je m’inspire de la culture vaudou dont le Bénin est le siège, car j’ai côtoyé des gens qui pratiquaient cette religion pacifiste. Les dieux du Panthéon vaudou sont calqués sur le Panthéon grec, on a les mêmes dieux. On a été bercé par des nounous africaines qui nous parlaient d’une divinité blanche, blonde, aux yeux bleus. Elle était représentée dans l’eau, comme une sirène. À l’époque où les colons sont arrivés, les béninois ont vu arriver des caravelles avec des figures de proue semblables à cette déesse. On l’appelle depuis Mami Wata, déformation de « mommy water ». Je m’en inspire beaucoup, mais aussi des premières amazones qui venaient du Bénin et dont les femmes se taillaient les dents pour tuer l’ennemi.

Quel est votre processus de création ?
Je commence une œuvre en fonction de mon inspiration de façon spontanée, sans faire de croquis préparatoire, puis je cherche l’équilibre. Il faut que ça soit différent de mon travail industriel. Ici, il n’y a pas de client qui passe commande. Les gens m’amènent des tas de ferrailles dans mon atelier à Dignes-les-Bains. Je peux rester devant trente minutes à regarder les morceaux pour imaginer ce que je peux en faire. Mes oncles avaient une ferme et je les aidais à souder en tenant les morceaux. Ils me disaient : « À force de voir, tu sauras faire. Un métier, ça se vole ! ».

Comment avez-vous imaginé le projet à Bandol ?
Sur la promenade, la côte est très ventée et on ne peut pas fixer les œuvres, donc j’avais peur, mais j’ai choisi des œuvres qui n’avaient pas de prise au vent. Je voulais aussi une diversité des formes et des techniques. À la Galerie Ravaisou, j’ai reçu quatre fois les scolaires. Je trouve que c’est une bonne idée de faire venir les écoles ! Je le fais rarement, mais j’ai l’habitude des enfants à l’hôpital. Parler des œuvres, ça leur permet d’avoir un esprit critique.
Maureen GONTIER

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