Céline Saraiva – Vers un monde nouveau ?

Exposition « Petits Mondes » du 27 juin au 2 novembre 2025 à l’Hôtel des Arts TPM à Toulon.

Céline Saraiva est conservatrice et responsable de la collection design- Arts décoratifs au CNAP (Centre national des Arts plastiques). Elle est également avec Marie-Ange Brayer, Anne Monier Vanryb et Lucile Montagne, commissaire de l’exposition « Petits Mondes », qui présentera en un parcours ludique des œuvres emblématiques du design pour enfant du XXème siècle, issues des collections du Centre Pompidou, du CNAP, du musée des Arts décoratifs de Paris et du Mobilier national.

Vous êtes une des commissaires de l’exposition Petits Mondes, a-t-il été difficile de choisir des pièces dans les illustres collections de plusieurs musées nationaux ?

Non, il n’a pas été difficile de choisir, car dans les quatre institutions concernées il y a des choses très différentes. Avant d’être au Centre national des Arts plastiques (CNAP), j’étais au Centre Pompidou, où j’ai beaucoup travaillé à l’enrichissement de la collection du fonds enfant. Et, lorsque que nous menons une prospective afin d’enrichir une collection, nous faisons très attention à ne pas racheter une pièce qui pourrait être déjà présente dans les autres collections, car elles forment ensemble la Collection publique nationale. Nous connaissons donc leurs spécificités, ce qui permet de faire des choix ciblés et précis. Pour Petits Mondes, le CNAP a beaucoup utilisé la singularité du fonds des Trois Ourses, maison d’édition associative ayant travaillé sur le livre d’artistes pour enfants et son environnement, et dont l’intégralité est conservée au CNAP depuis sa fermeture en 2018. Le propos d’un commissariat partagé comme celui-ci va donc être de montrer la richesse des collections publiques nationales et, ici, le large spectre des typologies d’objets dédiés à l’enfance qu’elles contiennent, qui va du jouet au livre, et du mobilier aux éléments de décors. Ce travail a été d’autant moins difficile qu’il a été réalisé pour un lieu atypique comme l’Hôtel des arts de Toulon, qui diffère d’un musée classique, ce qui nous a permis de penser l’exposition comme un parcours ludique, plein de pièces iconiques, dont certaines n’ont même jamais été montrées, et qui propose aux visiteurs de se plonger dans l’univers des créations dédiées à l’enfance.

Les oeuvres présentées datent elles surtout du 20è siècle ?

Il y a un ou deux jeux de la fin du 19è siècle, mais l’exposition est vraiment un parcours du début du 20 ème à nos jours. La petite échelle (je n’aime pas dire modèle réduit) raconte l’histoire différemment tout en la suivant. Nous avons fait, par exemple, une sorte de généalogie de la chaise pour enfants, un tracé dans lequel les visiteurs peuvent consulter des ouvrages, ou encore une salle pop, très colorée. Le jeu de construction est également un sujet très présent, en tant que jouet bien sûr, mais aussi dans le mobilier modulaire qui s’assemble comme des blocs de construction, c’est réellement une exposition d’icônes !

Au regard des pièces présentées, discerne-t-on les changements de la parentalité à travers les âges ?

On ne va pas forcément discerner cela, mais tout se lit entre les lignes. La question de la parentalité est en filigrane, sans être le propos de l’exposition. Le propos est de dire que tous les créateurs contemporains se sont intéressé à la petite échelle au même titre qu’au mobilier pour adulte, comme un enjeu majeur. Mais, tout est lié à l’explosion du désir profond de changement de société après la première guerre mondiale, qui impliquait évidemment l’éducation, et l’envie de donner une place nouvelle à l’enfant. Le premier congrès de la Ligue internationale pour l’éducation nouvelle date de 1921, Maria Montessori, Adolphe Ferrière, Ovide Decroly, John Dewey ou Beatrice Ensor étaient tous là pour discuter d’une façon d’éduquer différente, afin de tenter de mettre fin à l’horreur de la guerre et construire un monde nouveau…

Weena Truscelli

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