Dossier spécial : Un été à la Seyne – Chrystelle Di Marco – Au cœur du romantisme, l’âme du Festival Sand & Chopin.

Festival Sand & Chopin du 19 au 25 Août au Fort Balaguier

Soprano lyrique et directrice artistique, Chrystelle Di Marco porte depuis onze ans le Festival Sand & Chopin à La Seyne-sur-Mer. Entre pianos historiques, répertoire romantique et création littéraire, elle y cultive une vision sensible et exigeante de l’art. À l’approche de la nouvelle édition, elle revient sur l’âme de ce rendez-vous unique en son genre.

Cette prochaine édition du Festival Sand & Chopin sera la onzième. Avec le recul de ces dix premières années, avez-vous de nouvelles ambitions pour 2025 et la suite ?
Oui, toujours. Notre but reste d’approfondir l’univers artistique autour de George Sand et Chopin, mais aussi de montrer comment leur influence rayonne jusqu’aux XXe et XXIe siècles. Cette année, nous lançons une nouveauté : l’édition annuelle d’un ouvrage. En 2025, il s’agira de « George Sand, mes souvenirs » d’Henri Amic, proche intime de George Sand. C’est un texte très touchant, qui révèle l’humanité et la générosité de Sand dans ses derniers instants. Des extraits seront lus avant chaque concert, en ouverture et en deuxième partie. Cela ancre les soirées dans une intimité et une profondeur nouvelles.

L’une des spécificités du festival est l’usage de pianos d’époque, parfois du XIXe siècle. Que change cet héritage instrumental dans l’interprétation musicale et dans la réception par le public ?
Absolument, c’est même le cœur du festival. Nous avons une vingtaine de pianos historiques, datant de 1797 à 1930. Chaque année, nous sélectionnons plusieurs instruments, selon les œuvres et les artistes. Ces pianos ont chacun leur personnalité, leur couleur sonore. Un exemple marquant : un Broadwood de 1840, identique à celui utilisé par Chopin lors de sa tournée en Angleterre. Ces instruments sont précieux : ils témoignent d’un savoir-faire artisanal d’exception, unique en France. Le public entend des sonorités disparues aujourd’hui, et découvre une part invisible du patrimoine musical.

En tant que soprano et directrice artistique, vous êtes au cœur du festival, entre scène et coulisses. Comment vivez-vous cette double casquette, et comment cela influence t-il vos choix de programmation ?
C’est intense ! Je m’occupe de la programmation, du lien avec les artistes, de la logistique, de leur accueil, des logements… C’est un engagement total. Mais j’aime ça. J’ai besoin de ce lien humain, de cette générosité dans l’organisation. J’essaie de créer une atmosphère bienveillante, propice à l’échange. Et bien sûr, je chante aussi. Ce n’est pas toujours simple de garder de la place pour soi, mais ce rôle multiple m’aide à rester ancrée. Pour moi, la musique n’est pas un lieu d’ego. L’interprète s’efface pour faire passer une émotion, c’est ça qui me guide.

La Seyne-sur-Mer devient chaque été un écrin pour ce festival romantique. Que représente ce lieu pour vous, et comment s’inscrit-il dans l’esprit de George Sand et Frédéric Chopin ?
George Sand est venue à La Seyne en 1861, dans le quartier de Tamaris. Le Fort Balaguier est un écrin parfait : entouré par la mer, avec un jardin à la fois sauvage et structuré, une acoustique naturelle unique. C’est un lieu d’émotion pure. Nous y jouons sans amplification : ce sont les instruments, la voix, le lieu. Rien d’autre. Pour moi, cela incarne parfaitement l’esprit romantique : la beauté brute, le lien entre les arts, et ce souffle de liberté que Sand appelait “la république des arts”. C’est ça que nous cherchons à faire revivre, chaque été.
Grégory Rapuc