Daniel Van de Velde – reconnaître une autre forme d’intelligence.
« Faire, c’est donner à voir, c’est alimenter de nouveaux regards sur soi, les autres et le monde. » Cet artiste aux talents multiples nous invite à reprendre contact avec Mère Nature et à rendre à l’arbre sa liberté d’être intelligent et vivant.
Votre travail autour de ces arbres répond-il à une préoccupation écologique ?
D’une certaine manière, oui. Je n’ai jamais fait abattre un arbre pour réaliser une œuvre. Les troncs sont déjà débités, ou ils ont succombé à une crue ou à une tempête, comme c’est le cas ces derniers temps. Ensuite, quand je creuse pour mettre à jour les cernes de croissance de l’arbre, aucun déchet n’est produit. Les éléments extirpés du tronc s’utilisent en permaculture. Tous les procédés sont écologiques, les huiles et essences sont d’origine végétale. Je travaille en accord avec la nature.
Quel processus vous permet d’arriver à la forme finale de ces arbres évidés ?
Je commence par creuser les cernes annuelles de croissance de l’arbre. Je retire le centre de l’arbre et je vais vers sa périphérie. Sculpter c’est rendre l’espace/temps disponible. J’utilise des outils traditionnels : des gouges et des ciseaux à bois. Des outils vieux comme le monde mais qui renouvellent notre perception de l’arbre. Une fois segmenté et évidé, le tronc installé absorbe la lumière. Celle-ci représente l’énergie nécessaire à la croissance de cet arbre sur un certain nombre d’années, elle parait fossilisée.
Le positionnement dans l’espace tient une place importante dans votre travail, comment travaillez-vous cette scénographie ?
C’est l’harmonie entre la sculpture et le lieu qui fait l’œuvre. L’installation est une question d’accord, comme en musique. Vous accordez l’instrument en fonction du son que vous renvoie le lieu. Il en va de même pour mes sculptures. Je tiens compte des données architecturales, sociales et environnementales. Je cherche à combler les vides dans l’espace pour créer un dialogue entre œuvres, êtres humains et espace urbain.
Sur quoi travaillez-vous en ce moment ?
J’ai plusieurs expositions prévues pour les mois à venir. Je continue à créer des œuvres pour les deux expositions de Bandol, Galerie Ravaisou et Quai Charles de Gaulle. Je travaille aussi sur un projet pour le Domaine de Bunan, à Bandol aussi, qui m’a contacté afin que je crée une installation importante pour cet été dans leur domaine. Mon lieu de travail est un espace de quatre hectares. En ce moment, avec ce contexte particulier de confinement, cela a son importance. Le matin, j’y suis seul, j’ai l’impression d’être revenu au début du monde. Il n’y a plus de bruit, plus d’activité humaine, que la Terre qui respire. Avec mon travail, j’ai l’impression de créer une ouverture sur le monde de demain. Dans mon œuvre et dans le rapport que j’ai à l’environnement, je fais en sorte de libérer l’arbre de sa condition d’arbre comme nous l’entendons. Notre nature n’est pas morte : j’essaie de lui rendre sa place et sa condition d’être vivant intelligent. Je prépare aussi des œuvres pour la ville d’Annecy. C’est sans doute mon projet le plus important. C’est dans le cadre d’« Annecy-Paysage », manifestation en association avec la ville de Lausanne en Suisse. Egalement des œuvres pour la Fête de l’Arbre qui se déroulera au Château d’Astros à Vidauban. Ça dure deux jours et c’est pour moi une occasion privilégiée : je vais pouvoir y rencontrer toutes sortes de professionnels ayant des connaissance spécifiques à propos des arbres. Je vais ensuite partir faire une résidence sur une île au milieu de la Loire. Et après ça j’espère pouvoir me reposer un peu !