David Bizić – « Don Pasquale », une œuvre espiègle et mélancolique.

Don Pasquale », le 31 décembre et le 2 janvier au Zénith de Toulon (programmé par l’Opéra de Toulon).

 

David Bizić, baryton présent sur les plus grandes scènes lyriques internationales, chantera à Toulon (entre autres le soir du réveillon) le rôle-titre de « Don Pasquale », opéra bouffe en trois actes de Donizetti, avec l’orchestre et le chœur de l’Opéra de Toulon et dans une mise en scène de Tim Sheader. Il nous parle de ce rôle et de ses projets.

 

Ces dernières années vous avez interprété plusieurs oeuvres de Donizetti, Don Pasquale est-il un rôle que vous désiriez particulièrement chanter ?

Oui, complètement. C’est un rôle qui m’attirait depuis longtemps, mais je sentais qu’il fallait attendre le bon moment. J’ai souvent chanté Donizetti, mais plutôt des rôles plus jeunes ou plus lyriques. Pasquale demande un peu plus de vécu, autant vocalement que dans ce que l’on peut mettre sur scène. C’est un personnage qui vit dans ses contradictions, et il faut un certain recul pour qu’il fonctionne vraiment. Pour moi, ce rôle arrive au moment parfait de ma carrière. C’est drôle et touchant, avec plein de petites choses à découvrir à chaque répétition. On voit vraiment comment Donizetti peut faire rire et émouvoir en même temps.

Comment avez-vous préparé ce rôle et quelle est sa particularité ?

Je l’ai préparé comme tous mes rôles, en prenant le temps de regarder le détail et de comprendre qui est l’homme derrière la façade. Chez Donizetti, tout semble simple au premier abord, mais chaque phrase demande précision et intention. Vocalement, il faut être attentif au style belcantiste, à la diction, au phrasé… mais ce qui m’intéresse le plus, c’est le côté théâtral. Pasquale est comique, oui, mais si l’on ne joue que ça, il devient plat. C’est aussi quelqu’un qui rêve encore, qui croit pouvoir changer sa vie, même si c’est un peu ridicule. Quand on arrive à montrer ce côté humain, tout le reste — la comédie, les réactions absurdes — tombe naturellement. Et ça, c’est ce qui rend le rôle vraiment riche et amusant à jouer.

Est-ce amusant de jouer un personnage un peu ingrat et floué, très inspiré de la Commedia del arte ?

Oui, énormément. Pour moi, c’est un univers que je connais bien. Il y a quelques années, j’ai participé à une vraie production de Commedia dell’Arte avec « Don Giovanni », où je chantais Leporello. C’était parfait pour ce style : très Arlecchino, avec des interactions directes avec le public, de grands gestes, beaucoup de plaintes et de réactions rapides à tout ce qui se passe autour de lui. Cette expérience m’a appris à utiliser le corps et le regard autant que le chant pour raconter l’histoire. Pasquale me donne un peu la même sensation. Il a quelque chose de Pantalone : têtu, un peu vaniteux, mais au fond attachant. La Commedia, c’est beaucoup de physicalité, des changements d’émotion rapides, un lien direct avec le public et l’exagération assumée des caractères. Avec Pasquale, on retrouve cette énergie, cette liberté. On peut jouer le ridicule et l’humain en même temps, et c’est vraiment un plaisir à interpréter.

Pouvez-vous nous dire dans quelles œuvres vous nous enchanterez par la suite, quels sont vos projets ?

Je ne peux pas tout dire pour l’instant, mais la saison prochaine je chanterai Marcello dans « La Bohème ». C’est un rôle que je chante depuis presque vingt ans, au Metropolitan Opera, à Covent Garden, à Bordeaux, en Irlande… Et c’est un vrai bonheur de continuer à explorer ce personnage, car mon expérience de la vie change toujours la manière dont je l’aborde. Comme le disait Mario Lanza, ces airs ne révèlent pas leurs secrets si facilement. Même dans des rôles que je connais bien, je découvre toujours quelque chose de nouveau dans le texte, la ligne musicale ou le personnage. Chaque représentation devient unique et doit l’être, sinon ce n’est pas vivant. Je ferai également deux rôles de Bizet : Escamillo dans « Carmen » et Zurga dans « Les Pêcheurs de Perles ». Ces deux rôles sont très différents, avec des couleurs et des caractères contrastés. Alterner comédie et drame, Italie et France, c’est ce qui me nourrit et me permet de rester curieux et vivant sur scène.

Weena Truscelli

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