Enya Baroux L’histoire derrière le film : réécrire la fin de vie.

« On ira » – en salles

À l’occasion de l’avant-première de son film « On ira », diffusé au cinéma Pathé La Valette, nous avons rencontré Enya Baroux. Ce fut l’opportunité de revenir sur l’histoire personnelle qui l’a poussée à écrire et réaliser ce film poignant, abordant la maladie, la fin de vie et la mort à travers un regard à la fois intime et comique.

Qu’est ce qui vous a poussé à écrire et réaliser « On ira » ?

C’est une histoire très personnelle, liée à la fin de vie de ma grand-mère. Je l’ai accompagnée dans ses derniers moments, et cela a été une expérience en totale opposition avec la personne qu’elle avait été. C’était une femme joyeuse, drôle, et indépendante, mais sa santé s’est fortement dégradée, ce qui a été une source d’angoisse pour elle. Quand elle est partie, j’ai eu envie d’écrire un film qui parle d’elle, mais surtout de réécrire sa fin de vie. Je voulais lui offrir une autre fin, une où elle aurait eu le choix. Le fait de lui faire faire une sorte de road trip comme dernier voyage faisait partie de cette idée de lui donner cette liberté. Étant donné son grand sens de l’humour, j’ai décidé de traiter ce sujet en comédie. Nous avions l’habitude de rire de nos angoisses, donc j’ai voulu créer quelque chose de léger, mais respectueux, pour désacraliser la fin de vie, tout en offrant un message d’espoir.

Tout le long du film tu alternes entre humour et émotions, comment as-tu trouvé l’équilibre entre les deux ?

Grâce à l’aide de mes co-scénaristes, Martin Darondeau et Philippe Barrière. Nous avons choisi de ne jamais tomber dans le pathos. L’objectif était d’éviter les larmes artificielles et de ne pas surjouer le drame, tout en évitant l’humour trop lourd ou exagéré. Nous voulions un ton authentique, en utilisant un humour du quotidien, inspiré de nos propres expériences. J’ai vécu cela avec ma grand-mère, Martin avec son grand-père. Ce n’est pas du comique de situation, mais des moments réels, que tout le monde peut vivre, sans gags forcés et un humour qui découle des émotions des personnages. J’ai écrit une première version seule, pour poser sur papier ce qui me tenait à cœur, en mettant en avant des scènes personnelles. J’avais surligné en rouge les passages essentiels. Ensuite, mes co-scénaristes ont rejoint l’histoire sans l’affect que j’avais. Ils ont apporté leur regard extérieur, aidé à structurer le récit, et à affiner les personnages et les dialogues.

Il y a beaucoup de toi en « Anna » ?

Oui, énormément ! Dans sa personnalité, son côté rebelle, son envie de tout gérer seule et sa manière d’envoyer des piques à son père… Mais aussi dans sa vulnérabilité, sa fragilité qui apparaît à certains moments. C’était important pour moi que Juliette sache qu’Anna était inspirée de moi, tout en lui laissant la liberté de s’approprier le rôle. Les acteurs ont souvent peur de se retrouver enfermés dans une vision figée, donc Juliette a beaucoup apporté d’elle-même, ce qui rend Anna encore plus vraie et touchante.

« On ira » a été sélectionné au Festival du film de comédie de l’Alpes d’Huez, c’est une belle reconnaissance pour un premier film ?

Oui, c’était déjà une belle récompense avant même de penser à gagner un prix. Quand j’ai appris que le film avait été sélectionné, je me suis sentie victorieuse. Et en plus, nous avons remporté deux prix : Hélène Vincent et Juliette Gasquet ont été récompensées pour leurs performances. Cela a vraiment été une fête, car réussir à faire rire sur un sujet aussi difficile était un véritable pari. Ce prix était une belle revanche, surtout après les difficultés rencontrées durant le parcours.

Julie Louis Delage

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