Jean-Marc Avrilla – ESADTPM 2.0

De nombreux artistes que nous avons interrogés sont issus de l’ESADTPM. Il nous semblait donc naturel de donner la parole à son directeur, afin qu’il nous précise comment l’école arrive à s’adapter à notre situation.

Comment l’ESADTPM s’adapte-t-elle à cette situation très particulière pour une école fondée sur la pratique ?

L’ESADTPM est d’abord une communauté d’étudiants, d’enseignants et de personnels administratifs et techniques. La situation de crise que nous traversons a donc le même impact que pour toute autre communauté. Cette crise rappelle à notre groupe d’hommes et de femmes une priorité : comment pouvons-nous préserver les plus fragiles et maintenir le lien entre nous ? Dans un second temps, il s’est agi de penser la continuité de notre mission, celle de la formation. Toute l’équipe s’est mobilisée immédiatement autour d’un mot d’ordre : préserver le lien pédagogique avec les étudiants. Nous avons basculé vers nos outils numériques dès l’annonce de la fermeture des établissements d’enseignement supérieur. Et afin de préserver les liens et de donner à nos étudiants une sécurité psychologique, nous avons maintenu le programme et l’emploi du temps en déployant les outils disponibles : du téléphone et mail aux applications des réseaux sociaux, jusqu’à la mise en place d’une version 2.0 de l’école sur un serveur consacré aux jeux vidéo. Nous avons désormais, après deux semaines de fermeture, une plateforme multimédia qui permet à l’ensemble de notre communauté de se retrouver et d’échanger par forum, par téléphone, par vidéo, en visio-conférence de groupe, etc. La seule chose qu’on ne peut pas remplacer, ce sont les ateliers techniques comme la menuiserie, l’atelier métal, l’atelier terre, etc.

Comment penses-tu que les élèves vivent la situation, qui est aussi une source d’inspiration ?

Les retours montrent les mêmes problématiques liés au confinement que pour l’ensemble de la population. Du point de vue de la formation, la difficulté est la différence d’accessibilité aux outils numériques selon la situation socio-économique de chaque étudiant. Je note une grande solidarité entre eux et évidemment de la part des enseignants. Tous ont un accès, et on adapte au cas par cas de manière à assurer l’égalité de traitement pour chacun de nos étudiants. Nous sommes un service public et l’équipe dans son ensemble est très engagée. Nous vivons une tragédie, au sens antique du terme, au sens d’une mise sous tension de l’ensemble de la société face à un péril. Cette tragédie, cette situation de crise, interroge l’humain profondément dans sa conscience sur le sens de sa vie, le rapport au danger et à la mort. Je ne parlerai pas de source d’inspiration mais de choc. Le temps n’est pas à la représentation mais à la pensée, modestement quand on n’appartient pas à un secteur essentiel à la vie sous sa forme la plus élémentaire. Mais cette pensée est essentielle pour comprendre la complexité de ce que nous vivons, et c’est l’activité principale de nos étudiants dans leur formation. Ce que nous vivons aujourd’hui nous transformera. Nos étudiants essaient de penser la situation comme nous tous, afin de préparer dès à présent l’après-crise.

Peux-tu nous dire un mot sur l’état d’avancement de la nouvelle école ?

Nous conservons notre calendrier afin d’organiser notre prochaine rentrée dans notre nouveau bâtiment du quartier Chalucet. D’ailleurs, nous maintenons notre concours d’entrée et notre commission d’admission en avril, mais les avons entièrement dématérialisés. Les candidats ont jusqu’au 6 avril pour s’inscrire sur notre site internet et retrouver toutes les informations concernant les modalités d’organisation. D’une manière générale, nous avons beaucoup travaillé ces dernières années avec l’équipe de l’école et l’équipe de Corinne Vezzoni afin d’adapter au mieux le bâtiment aux nécessités pédagogiques et le rendre modulable. La crise actuelle va nous conduire à amplifier cette réflexion sur notre projet.