John Deneuve – La norme et les paillettes.
Arts plastiques
Exposition au
Metaxu à Toulon
du 11 septembre au 3 octobre
Avec sa voix de petite fille, John Deneuve répond à nos questions et nous déstabilise par la légèreté qu’elle dégage. Progressivement, nous glissons confortablement dans son univers : là où les pistes sont brouillées.
Qui est John Deneuve ?
Un homme blanc hétéro d’une cinquantaine d’années qui joue au Monopoly avec des vrais billets… ou une femme artiste lesbienne handicapée avec une cape d’invisibilité qui peint avec ses pieds. J’ai grandi avec beaucoup de super-héros et j’avais envie de créer un antihéros face à la norme, à la pression sociale, la culpabilité, la peur, le mérite. Toutes ces notions imposées par notre société patriarcale, capitaliste et judéo-chrétienne dans laquelle nous sommes plus nombreux à être des « minorités ». J’ai choisi un pseudonyme qui
représente des icônes : John, l’icône américaine et Deneuve, l’icône française.
As-tu déjà commencé à réfléchir à ce que tu avais envie de présenter au Metaxu ?
Oui, je vais investir l’espace sous forme d’autels mexicains de la fête des morts. L’esthétique se situe à la frontière entre l’art primitif, la transe et les codes séduisants de la culture populaire. Je laisse toujours une part d’ambiguïté quant à la signification des objets que je présente. Le spectateur interprète ce qu’il voit à travers ce qu’il a appris. Dans mes installations, on est désorienté, on sent que tout est absurde, il n’y a pas d’explication claire. Pour cette exposition, je m’intéresse toujours aux minorités, mais du côté du handicap.
Je propose une réflexion sur le validisme. Encore une fois, mon travail n’est pas frontal, je pointe indirectement un sujet, toujours sur le fil, parce que je ne cherche ni à être militantiste, ni provocatrice. Le soir du vernissage, je ferai une performance avec mon groupe Bain de minuit. Je mettrai en scène mon corps avec une bande-son électronique et l’artiste Olivier Le Falher qui jouera de l’orgue.
Pourquoi le sujet du handicap t’intéresse-t-il particulièrement ?
A trente ans, j’ai eu un accident. Avant, je faisais de la vidéo et des installations. Mais là, j’étais tout le temps couchée, alors je me suis mise à faire de la peinture. C’est à ce moment-là que ma pratique a changé. J’ai fait des sortes de logos colorés, un peu trash, en cherchant la régression, à déconstruire pour m’affranchir des limites et des fondements. Je suis artiste et personne non-valide, il y a peu d’artistes qui travaillent là-dessus. On n’intègre pas les personnes non-valides et on ne prend pas les histoires dans leur ensemble. On est super en
retard en France à ce niveau. La majorité des gens qui ont des handicaps invisibles galèrent pour être intégrée. Ta pratique est protéiforme.
Qu’est ce qui lie ton utilisation de l’installation, de la performance, de la vidéo et du dessin ?
Dans mon travail de performances, je parle de la question du genre et du féminisme. Je me transforme, me déguise, je m’amuse. Le but, c’est d’avoir un espace de liberté. Mon boulot
est très régressif, il y a un rapport à l’enfance. C’est un travail de lâcher-prise intuitif qui paraît presque innocent. Je fais aussi du son depuis toujours, je compose sur ordi. Pour les vidéos et les performances, il y a toujours une base de musique électro-techno, mais je peux parfois créer un instrument un peu ridicule avec des objets
que je trouve. J’interroge la société du spectacle, la société de consommation et je joue avec l’esthétique des mass media, de la pub. Le résultat, c’est beaucoup de paillettes !
Maureen Gontier
Site internet : John Deneuve – Metaxu
Page Facebook : METAXU
John Deneuve – Sudbury performance