Manon Delaigue – Les acrobaties de l’Histoire.
« Radio Maniok » du 26 au 29 mars aux Chapiteaux de la Mer à la Seyne
Manon Delaigue est responsable de projets territoriaux et de la communication de la Cie Cirquons Flex, établie sur l’île de la Réunion. Le spectacle Radio Maniok mêle acrobaties, danse, musique et narration, en utilisant pour toile fond l’histoire cruelle d’une période de deux ans, pendant la Seconde Guerre mondiale. Un spectacle proposé par Le PÔLE, arts en circulation.
Peux-tu nous présenter la compagnie Cirquons Flex ?
Cette compagnie est née d’une rencontre entre deux artistes,Virginie Le Flaouter et Vincent Maillot, sur l’île de la Réunion. Virginie a fait l’école Nationale de Cirque de Montréal et Vincent est autodidacte. Ils ont fondé la compagnie en 2007 et fait de nombreux spectacles. Finalement, ce sont eux qui ont développé le Cirque contemporain à la Réunion. Ils font des résidences de territoire sur l’île, s’implantent dans des endroits nouveaux, s’installent plusieurs semaines, rencontrent les habitants, et cela les inspirent pour leurs futures créations. En 2019, ils ont tourné avec “Appuie-toi sur moi“, dernier spectacle à deux de Virginie et Vincent. Depuis la compagnie est conventionnée par la DAC de la Réunion – Ministère de la Culture, la Ville de Saint-Denis, la Région et le Département de La Réunion et, pendant le confinement, l’envie d’une écriture qui impliquerait de partager la piste avec d’autres artistes s’est imposée au duo.
D’où le spectacle Radio Maniok qui sera joué à la Seyne sur Mer ?
Exactement, Virginie et Vincent ont mobilisé un collectif d’artistes circassiens de la Réunion et ont alors fondé le collectif pour le spectacle « Radio Maniok ». Radio Maniok est donc un projet de Cirquons Flex – car à la direction artistique il y a Vincent et Virginie – mais qui regroupe plusieurs compagnies qui ont, par ailleurs, leurs propres projets.
Le cirque est-il un art passeur d’idée plus accessible que d’autres formes d’expressions ?
Nous en sommes convaincus, car le cirque reste un art assez populaire. Et puis, en plus des numéros incroyables, il y a l’attrait du chapiteau, qui éveille la curiosité et ramène à l’enfance. Pour Radio Maniok plusieurs disciplines sont rassemblées, acrobaties, numéros aériens et, en plus de tout cela, les artistes jouent de la musique et il y a des textes, dont certains sont en créole, car nous parlons de la Réunion et nous adressons également aux Créoles. Et puis, les circassiens, habitués aux chapiteaux, prennent aussi un temps pour briser le quatrième mur et s’adresser directement au public. Il y a même une distribution de morceaux de galettes de manioc pendant l’entracte !
La Réunion et son histoire sont-elles mal connues en France métropolitaine ?
Certainement, mais je crois aussi que les Réunionnais connaissent mal leur histoire. En tout cas celle qui sert de toile de fond au spectacle, c’est à dire la période de la deuxième guerre mondiale. À la Réunion, on parle beaucoup de l’esclavage – c’est tout à fait normal et très important – mais la période historique qu’aborde Radio Maniok est un énorme tabou sur l’île. Globalement, peu de gens se sont posé la question sur le déroulement des évènements dans les îles pendant cette guerre, le devoir de mémoire n’a concerné que la métropole ! C’est durant une de leurs résidences de territoire que la compagnie a croisé un monsieur d’un certain âge qui leur a raconté cette histoire d’isolement, de non-ravitaillement et de famine qui a duré deux ans à la Réunion pendant la dernière guerre mondiale. Sur cette trame historique, le spectacle soulève évidemment d’autres questions, comme celle de l’autonomie alimentaire …
Weena Truscelli