Milena Annaloro – Sous les pierres de Saint-Jean, des siècles d’histoire retrouvés.

Travaux Eglise Saint Jean XXIII, La Valette-du-Var, fin des travaux décembre 2025

 

La restauration de l’église Saint-Jean à La Valette-du-Var progresse, révélant autant de défis techniques que de trésors inattendus. L’architecte Milena Annaloro et Pascale Solé, pour la Fondation du patrimoine, reviennent sur un chantier où mémoire locale et mobilisation collective se rejoignent.

 

Milena, quelles ont été les premières étapes du chantier ?
Il a fallu retirer les carrelages des années 1950, abîmés et peu adaptés à l’esprit de l’église, puis monter les échafaudages pour accéder aux voûtes. Le nettoyage des murs et plafonds s’est fait grâce à la technique du film latex : une pellicule appliquée puis retirée emporte poussières et dépôts accumulés. Travail minutieux, mais essentiel pour révéler pierre et décors.
La cohabitation entre nettoyage et préservation des peintures a été un vrai casse-tête. La poussière menaçait les décors du chœur. De grandes bâches ont été posées et nos méthodes adaptées. La consolidation de la mezzanine a aussi révélé des surprises : les poutres n’étaient pas placées comme prévu. De nouvelles études structurelles ont été nécessaires. Des aléas fréquents sur des bâtiments anciens, qui exigent de l’adaptabilité.

 

Deux pierres tombales ont été découvertes sous le sol. Était-ce attendu ?
Milena : Pas du tout. Celle du curé Martre, pendu pendant la Révolution, était connue, mais celle de Louis Glue, marquis d’Espinville, totalement ignorée. Ces découvertes créent toujours une émotion : elles relient l’édifice à l’histoire de la ville et rappellent que l’église a traversé les siècles en portant les traces de ceux qui y ont vécu et reposé.

 

Qu’est-ce qui vous touche le plus dans ce projet ?
Milena : L’histoire plurielle de l’église. On distingue son évolution : d’abord une petite chapelle de pâtres, puis, au XVIIe siècle, une nef plus vaste pour accueillir les fidèles. L’arc triomphal marque la jonction des deux parties. Restaurer un tel lieu, c’est respecter ses différentes strates de mémoire tout en le préparant à accueillir encore longtemps la communauté.

 

Pascale, quel rôle joue la Fondation dans un chantier comme celui de La Valette ?
Notre mission est d’accompagner collectivités et associations dans la recherche de financements. Pour l’église Saint-Jean, une convention a été signée en 2022 avec la mairie. Elle couvre le remplacement du sol, le nettoyage des pierres et enduits, la restauration des arcs de la nef et de la porte latine. Après devis, l’objectif de collecte a été fixé à 50 000 €.
À ce jour, 108 donateurs ont permis de réunir 20 850 €. S’y ajoutent 17 000 € provenant directement de la Fondation, via mécènes et dispositifs internes. Nous atteignons près de 38 000 €. La collecte se poursuit encore quelques mois, le temps que les travaux, attendus pour fin décembre, s’achèvent.

 

Au-delà des financements, quel est l’apport de la Fondation ?
Pascale : Nous offrons une visibilité dépassant le cadre local. Chaque projet est présenté sur notre site et relayé lors de temps forts comme les Journées du patrimoine. Les habitants comprennent que leur église, leur lavoir ou leur oratoire s’inscrit dans un réseau national, ce qui suscite l’envie de participer. La Fondation agit comme un trait d’union entre public et patrimoine, souvent non classé et sans aides de l’État. À La Valette comme ailleurs, notre rôle est d’encourager la générosité et de fédérer les énergies autour d’un bien commun.

 

Grégory Rapuc