Morgane Audouin – Nenna et la quête d’une recette idéale…

>>Dossier spécial: Festival Regards sur Rue #5 à la Seyne  samedi 28 et dimanche 29 septembre, place Perrin à 13h

Dans une rue, le public découvre Nenna une poignée de semoule dans sa main. Elle est à la recherche de la recette idéale des msemens que lui faisait sa grand-mère et, sans nostalgie, expose les souvenirs issus des différentes cultures dans lesquelles elle se trouve, se retrouve et ne se sent en rien tiraillée…

Votre formation comprend art dramatique et géographie, pouvez-vous nous en dire davantage ?
J’ai en effet été formée au CDN (Centre Dramatique National) de Reims et je suivais en parallèle des études de géographie. J’ai fait un master à l’Université de Poitiers où il existe un labo de recherches autour des migrations de population et, c’est dans ce cadre, grâce à la présence d’une compagnie algérienne qui mettait en scène à la fois des auteurs français et algériens, que j’ai pu commencer à mêler théâtre et géographie. J’ai également été interprète, et suis finalement rentrée en 2017 à la FAI-AR, qui est une formation d’art en espace public à Marseille.

D’où certainement votre choix de jouer en extérieur. Que représente le fait de se produire dans la rue pour vous ?
Il y avait une vraie volonté de ma part de choisir cette forme d’expression. J’ai besoin de ce rapport spontané et direct, de pouvoir interpeller, regarder dans les yeux, être ensemble dans le même espace, de respirer le même air, c’est quelque chose que j’avais vraiment envie d’expérimenter. Et puis, il y a la dimension plus politique de l’accessibilité du théâtre de rue à des personnes peu habituées à pousser la porte des théâtres. Le mélange se fait davantage dans l’espace public. Je voulais m’adresser à ces gens, mais aussi réussir à attirer l’attention de personnes qui se laissent embarquer par une histoire, simplement parce que ça se passe en bas de chez eux.

Quelques mots sur votre spectacle « Nenna » ?
« Nenna » est un projet né à la FAI-AR, cette formation faite à Marseille. Il y avait longtemps que je voulais parler de ce pan de mon histoire familiale qui est liée à la guerre d’Algérie, pays que je n’ai pas pas connu et que ma famille a quitté. La première image vraiment forte pour moi, qui me vient pour parler de l’Algérie est celle de ma grand-mère, en France, dans sa petite cuisine de Châlons-sur-Marne, qui se bat avec une pâte pour faire des msemens. C’est à partir de cette image que j’ai tissé ce spectacle, qui prend donc comme point de départ cette recette, et déroule l’histoire de ma famille depuis son exil d’Algérie, en mêlant petite et grande Histoire.

Quelques mots sur la compagnie Raoui ?
Cette compagnie a également été créée à la sortie de ma formation marseillaise afin de pouvoir porter des projets. J’en suis la directrice artistique, mais je collabore avec d’autres personnes. Pour le spectacle « Nenna » je me suis associée à Maïa Ricaud, de la compagnie « Les Chiennes Nationales », nous avons vraiment co-écrit ce spectacle d’après ma trame.

Que pensez-vous de cette tendance actuelle à devoir toujours se définir, prouver une identité ?
Je ne suis pas certaine d’être assez qualifiée pour répondre ! Je pense que cette question d’identité peut être pesante, mais aussi que nous avons quelquefois besoin de parler de nos racines, et puis parfois, pas du tout. Mais surtout, il me semble que nous sommes toujours plus vastes qu’une identité, nous n’avons pas une identité à laquelle nous nous assignons, mais plusieurs. Dans « Nenna », je parle vraiment de moi, des deux cultures auxquelles j’appartiens, mais je n’en souffre pas, je ne suis pas tiraillée, et c’est de ce point de vue là que je me pose.

Weena Truscelli

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