Valérie Zaleski – Exploration en douceur à l’HDE.
>> »Les Routes de la Soie » jusqu’au 29 septembre
Commissaire d’exposition au Musée Guimet, Valérie Zaleski nous présente la nouvelle exposition de l’Hôtel Départemental des Expositions du Var à Draguignan, « Les Routes de la Soie, entre vestiges et imaginaire ».
Comment en vient-on à créer une telle exposition ?
Il faut être passionnée par l’Asie ! Ça demande un tel investissement, on ne peut pas faire ce travail sans un moteur très fort. Il y a cinq musées en France sur cette culture, tous dans le sud à part celui de Paris, le Musée Guimet. Cela représente peu d’opportunités de travailler dans ce domaine-là ! Après avoir passé les concours de la fonction publique, je suis devenue conservatrice des collections bouddhiques chinoises et d’Asie centrale du Musée national des arts asiatiques-Guimet. Le Département du Var nous a sollicités avec le désir de créer une exposition qui n’avait jamais été réalisée auparavant et de fil en aiguille, nous en sommes venus à la thématique « Les Routes de la Soie : entre vestiges et imaginaire ».
Qu’est-ce qui rend cette partie de l’Histoire particulièrement passionnante à vos yeux ?
Quand on traite ce sujet, on se rend compte qu’il a fait énormément rêver. Il y a beaucoup de visions fantasmées aussi bien dans les sources latines que dans les sources chinoises. D’un point de vue chinois, les routes de la soie se situent uniquement en Chine, mais il y a plusieurs manières d’aborder les choses. Il s’agit au premier abord des échanges commerciaux entre Orient et Occident. Ces routes sont nommées « de la soie », parce que ce bien n’était pas produit en occident et les chinois en avaient le monopole, à tel point que la soie est devenue une monnaie d’échange. La géographie a beaucoup d’importance. Chronologiquement, la période est très vaste, du IIème siècle avant notre ère jusqu’au XIIIème. Travailler sur ce type de thématique prend beaucoup de temps. Le British Museum traite actuellement le même sujet, mais sur deux siècles, différemment. Ils travaillent dessus depuis six ans, tandis que de notre côté, la demande a été faite en février 2022. La complexité pour nous, c’est de traiter un sujet de ce type pour un large public, à la fois précisément et de manière générale. Une exposition n’est pas un ouvrage, il faut montrer, donner à voir. Notre chance est que le climat de l’Asie centrale a permis la conservation des vestiges matériels. Emprunter à l’étranger demande de grands délais parce que ce sont des décisions quasiment politiques, mais le musée Guimet a une grande collection. Nous exposerons à Draguignan environ trois-cent cinquante pièces.
Quel a été le parti pris scénographique ?
Il a fallu s’adapter au bâtiment pour le découpage thématique, sur trois étages avec des vitrines non amovibles. Le premier étage est dédié aux routes : il y a des cartes, des trajets, des photographies. On part sur les traces des explorateurs. C’est un hommage à ces gens qui ont parfois risqué leur vie sur des chemins souvent dangereux. Le deuxième est dédié aux populations impliquées, nous y exposons des figurines funéraires, des manuscrits, des peintures. Et le troisième, au commerce des routes terrestres avec des vestiges matériels, monnaies, soie, chanvre, pierres semi-précieuses, objets de bronze. La dernière partie est dédiée à la culture immatérielle, aux techniques, aux échanges d’idées et de religions, en particulier au bouddhisme qui s’est développé à cette période-là. La fin de l’exposition est aussi consacrée aux routes maritimes, dont les épaves ont conservé principalement de la céramique. C’est la partie la plus immersive esthétiquement.
Maureen Gontier