Yves Sente – Et si…? De la géopolitique à la fiction.

La Fête du Livre du Var – Du 18 au 20 novembre à Toulon

Créée en 1984 par Vance et Van Hamme, la série culte de bande dessinée « XIII » a été reprise dans les années 2000 par Yves Sente au scénario et Iouri Jigounov au dessin. Avant de venir présenter le ving-huitième tome à la Fête du Livre du Var, sur le stand de la librairie Falba, Yves Sente nous en dévoile les coulisses.

 

Comment se passent les étapes de création entre vous et Iouri ?
Il faut d’abord imaginer un thème, une idée générale. On écrit des histoires qu’on aimerait lire. Évidemment, j’en parle à Iouri pour savoir si cela l’inspire. Chaque dessinateur a ses propres goûts. C’est assez simple, car on se connaissait déjà depuis une dizaine d’années lors du premier tome et on est devenu amis. Une fois qu’on est d’accord, je me mets à me documenter. Il faut connaître son sujet et une intrigue doit être structurée. Le format demandé est précis, il faut répondre en quarante-six planches. On découpe page par page, case par case, c’est la partie la plus compliquée. Ensuite, il y a plusieurs lectures pour peaufiner les choses. C’est seulement là que le dessinateur peut commencer à travailler. Un scénario en milieu urbain ou dans le désert ne demande pas le même travail, mais en général, ça va lui prendre à peu près un an et demi.

Qu’est-ce qui différencie votre proposition sur la série de celle de vos prédécesseurs ?
La spécificité de « XIII », c’est le rapport entre le contexte géopolitique et sa quête personnelle. Je devais respecter le thème de la quête de l’identité du héros qui a perdu sa mémoire, alors la première chose que j’ai faite c’est de tout relire et de découvrir les éléments de l’histoire auxquels nous n’avions pas répondu. Dans le dernier tome, “Cuba, où tout a commencé”, nous sommes parvenus à sortir XIII des USA malgré lui avec un décor très différent. C’est un retour aux origines qui dévoile un pan de sa vie au tout départ. Ce thriller a toujours été contemporain et ce, depuis quarante ans ! L’auteur s’inspirait de mythes et de scandales de son époque, qu’il transformait à sa manière. Quand on m’a proposé de reprendre la série, nous étions dans les années 2000, le contexte géopolitique avait changé, j’avais donc d’autres sujets à traiter.

Est-ce que votre parcours en sciences politiques vous a aidé ou inspiré dans cette série ?
Avant, je voulais passer le concours diplomatique. La géopolitique m’a toujours passionné et le cursus que j’ai fait m’en a appris les bases. Je tombe aussi souvent sur des documentaires qui m’inspirent. Quand on est scénariste, la majorité du travail consiste à se documenter. La question à se poser en géopolitique et en fiction est exactement la même : “et si …?”. On doit trouver un équilibre entre surprendre et rester crédible. Quand j’ai lancé le sujet de l’arrivée au pouvoir des extrémistes américains ultra conservateurs, c’était avant que Trump devienne président. Finalement, il était plus dingue encore que nos personnages. Parfois la réalité dépasse la fiction.

Est-ce que certaines choses ont évolué pour vous entre votre premier tome (20) et l’actuel numéro 28 ?
La chose fondamentale qui a changé, c’est le rapport au temps du récit. Avant, tu démarrais une histoire à tes dix-huit ans et tu en connaissais la chute à tes vingt-six ans, mais aujourd’hui on ne peut plus tenir le public dix ans sur le même scénario. On regarde une saison entière de série-télé en streaming en un week-end. Il a fallu adapter les histoires.

Maureen Gontier

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